samedi 16 mars 2019

DES OUVRIERES DE LA FN AUX MARIE MINEUR

LES MARIE MINEUR : L' EGALITE  +  LA LIBERTE

Les années 70, dans la foulée de mai 68 seront les années du développement tous azimuts des organisations féministes, en Belgique comme dans le reste de l'Europe.
Et elle connaîtront de grands moments comme la journée des femmes du 11 novembre 1972, où 8000
femmes (et hommes) se rassemblent au passage 44, en présence de Simone de Beauvoir ; comme la publication à la même occasion , en 1972 du '' petit livre rouge des femmes » , brochure qui aborde tous les aspects du combat féministe, y compris le combat des femmes au travail. Tiré à 15000
exemplaires, il sera épuisé en quelques mois .

Et des grands combats comme celui de 1973 pour la libération du médecin communiste, le Docteur Peers jeté en prison pour pratique illégale d' interruptions de grossesses , qui se poursuivra dans la rue pour exiger la dépénalisation de l' avortement.
Dolle Minas , Front de Libération des femmes, Groupe d'action pour la libération des femmes , autant de groupes qui naissent en 1970, 1971 dans la foulée de mai 68.(6)
1973 Le Docteur PEERS dans la rue après sa libération.
Ils ne réclament plus seulement l'égalité, mais aussi la liberté de la femme en tant qu'être humain, seule maître de son corps, de sa sexualité, de son choix de maternité ;  »notre corps nous appartient », « mon ventre, c'est chez moi »
Mais, dans le cadre de la commémoration des  50 ans de la grève de la FN, mon attention est attirée par le combat des Marie Mineur (7) ,organisation féministe en milieu ouvrier, active principalement dans la région du Centre, mais aussi à Charleroi et Liège.
Je me réfère pour ce paragraphe exclusivement à  l'ouvrage : " Jeanne Vercheval, un engagement social et féministe" de Claudine Marissal et Eliane Gubin édité par l'Institut pour l’égalité des femmes et des hommes- 2011.(8)Que je référence ci dessous (JV – IEFH) 
Dans les années 70, c'est elles qui , pour ce que j'en connais, porteront le plus loin l'héritage de la grève des femmes de 1966.
Leur animatrice principale : Jeanne Vercheval , militante féministe de gauche .
Issue de famille ouvrière, de conviction communiste, elle avait été de 1963 à 1967 la cheville ouvrière de l'action anti- impérialiste et du soutien au Vietnam et avait créé les comités d'action anti impérialistes des jeunes.
Comme les autres organisations féministes , les Marie Mineur se jetteront dans le combat pour soutenir le docteur Peers et pour la dépénalisation de l'avortement .
Militantes ouvrières en milieu ouvrier, elles vivent de très près la détresse des femmes du peuple obligées d'interrompre leur grossesse, qui n'ont pas les moyens de se payer un avortement aux Pays Bas.
Mais les Marie Mineur ont un engagement politique et rappellent sans cesse la dimension sociale de la lutte des genres.
« Elles sont d’autant plus réceptives aux théories anticapitalistes que leur région subit de plein fouet le déclin industriel ; beaucoup ressentent personnellement les difficultés sociales au quotidien. »
« Notre but vise principalement à toucher les femmes de milieu modeste. Femme travailleuse – épouse et fille de travailleur – notre mouvement se met donc au service des moins favorisées ».



photo www.labiso.be
« Les Marie Mineur réclament la mixité de l’enseignement dans toutes les écoles et à tous les niveaux, un même contenu éducatif pour les filles et les garçons. [...] Les Marie Mineur refusent l’exploitation du corps des femmes par la pornographie, le cinéma, le théâtre et la publicité. [...]
Les Marie Mineur réclament la généralisation de l’éducation sexuelle, la légalisation des moyens anticonceptionnels et le droit des femmes à l’avortement libre et gratuit. [...]
Les Marie Mineur défendent avec force le principe « À travail égal, salaire égal ». Elles dénoncent la réglementation spécifique du travail féminin : si réglementation il y a, elle doit s’appliquer aux deux sexes de la même manière, car le travail féminin n’est pas un travail d’appoint, il a la même valeur que le travail masculin. [...]
Dans la sphère privée, les Marie Mineur réclament une participation égale des père et mère au processus éducatif et aux tâches ménagères. « Répartissons les travaux de la maison, selon les goûts de chacun et sa disponibilité (repassage, nettoyage, bricolage, jardinage) [...]. Que disparaisse cette affreuse boutade ‘femme à tes casseroles !! Hommes et femmes sont capables de tout faire. Question d’apprentissage ! » (JV- IEFH pp145-146)

Dans les années 70, les Marie Mineur interviendront dans plusieurs grèves
« En Hainaut, terrain d’action privilégié des Marie Mineur, des grèves éclatent à la faïencerie Boch-Keramis à La Louvière (1971-72 et 1975), à l’usine de relais de centraux téléphoniques Siemens à Baudour (1976), à la fabrique de pantalons Farah à Obourg (1977)et SA Confection industrielle (ex-Salik) à Quaregnon (1978-79) [...]
« Nous étions présentes lors des grèves, on nous demandait un coup de main pour les piquets. On allait parfois chercher les enfants à l’école, tout simple-ment. On était là. On était disponible. Et ça, petit à petit, les travailleuses du coin le savaient : ‘on téléphone aux Marie Mineur ! »(JV- IEFH pp145-146)
Et dés 1975 , quand la crise du choc pétrolier de 1973 éclate, elles se lancent dans le combat contre le chômage qui frappe en premier lieu les femmes ( 60% des chômeurs indemnisés , en 1977 sont des femmes.)
                           Manifestation des Marie Mineur à La Louvière   photo www.labiso.be
« Les Marie Mineur publient le Livre blanc sur le chômage des femmes ,[...] (qui) expose clairement les risques d’exclusion et la manière de s’en protéger.
Une douzaine de comités de chômeuses se créent en moins de deux mois dans la région louviéroise. Conduits par quelques femmes motivées, ils touchent chacun plusieurs dizaines de chômeuses.
Les Marie Mineur assurent leur coordination.
Le 7 février 1977, Jeanne et ses amies organisent dans les rues de La Louvière une manifestation qui rassemble quelque 600 femmes. Elles réclament du travail, la suppression des exclusions du chômage, le respect des droits de tous les travailleurs sans emploi et la réduction du temps de travail à 36 heures par semaine »(J.V- IEFH p 150-151)
« Inlassablement, les Marie Mineur interpellent le monde syndical. Elles dénoncent la faible représentation féminine dans les structures syndicales, l’absence des femmes dans les négociations sociales, même dans les secteurs où les travailleuses sont majoritaires (à titre d’exemple, la fermeture de Farah à Obourg a été négociée en concertation avec les permanents syndicaux masculins), le manque d’autonomie des commissions syndicales féminines, ... En 1977, une table ronde du textile (un secteur principalement féminin) réunit au meeting final 2.000 participants «
dont 1.800 femmes. À la tribune des permanents syndicaux, pas de femmes ! »(J.V- IEFH p 155)
Mais à force de faire trotter les délégués, comme l'avait fait petite Germaine et les ouvrières de la FN en 1966, « la stratégie de l’aiguillon porte ses fruits et, à la fin des années 1970, les syndicats intègrent peu à peu les intérêts des travailleuses et des chômeuses. » (JV – IEFH p159)
Et là commence un autre épisode, celui écrit par les militantes et militants au sein des organisations syndicales pour l'égalité ses genres.
Voilà , ami lecteur ,à travers ces années de combat des années 60 et 70 quelques figures de femmes militantes engagées à gauche , qui à travers différents types d' engagement, divers groupes ou organisations , ont soutenu et continué le combat des ouvrières de la FN .
Celles ci avaient allumé le grand feu du combat pour l'égalité des femmes et des hommes, d'autres avaient entretenu la braise, et grâce à elles et à toutes celles et ceux qui les ont suivies le feu qui couve ne pourra plus jamais être éteint.

MARIANNE organisation des femmes du PTB  (Photo Solidaire, Martine Raeymaekers)



(6) sur le renouvea féministe des années 70 voir "Le féminisme est dans la rue: Belgique 1970-1975"- p22 - Marie Denis,Suzanne Van Rokeghem - POL-HIS
(7)Marie Mineur « Militante ouvrière, très probablement épouse de militant, elle a créé à Verviers en 1872 la seule section féminine de l’Association internationale des Travailleurs. Elle a pris la parole dans des meetings avec beaucoup d’énergie et milita durant une vingtaine d’années dans des cercles
anarchistes et rationalistes « pour le triomphe des idées d’émancipation »
 Un livre lui a été consacré : "Marie Mineur. Marie rebelle" de Freddy Joris édition Avant propos 2011

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