samedi 18 novembre 2017

OCTOBRE 1917 : LES AVENTURES D' EMILE VANDERVELDE ET JULES DESTREE AU PAYS DES SOVIETS (2)

JULES DESTREE : PELERIN DE LA GUERRE

A la mi octobre 1917 ,en pleine déroute militaire du gouvernement provisoire , à la veille de la prise du pouvoir par les bolchéviks, arrive à Petrograd , tel un carabinier d'Offenbach , un infatigable combattant pour la guerre au finish , dirigeant du Parti Ouvrier Belge (POB) , député socialiste de Charleroi depuis 1894 , brillant avocat de 54 ans , JULES DESTREE .
1er MAI 1917 à PETROGRAD

Gamin, élève dans une école primaire de COUILLET, habitant à MARCINELLE, sa ville  de naissance, j'avais gardé l'image d'une des grandes  personnalités du PAYS NOIR, si pas la plus grande. 
Mon instituteur nous en parlait avec tellement de vénération.
Rue, place, avenue JULES DESTREE , école JULES DESTREE, institut JULES DESTREE, musée DESTREE..., pas possible d'y échapper.
Par la suite, dés les années 60 et 70 et la marche vers le fédéralisme et la régionalisation, le régionalisme wallon s'est emparé de sa mémoire avec celles d' ANDRE RENARD, et de bien d'autres, qui seront , en 2011, honorés à titre posthume de la distinction de "COMMANDEUR du MERITE WALLON".
JULES DESTREE, ancien ministre des Sciences et des Arts  en 1920-21,  père du régionalisme wallon ...
Sa statue à Charleroi est toujours un endroit de ralliement de telle ou telle manifestation ...
Et voilà qu'aujourd'hui , derrière cette figure légendaire de mon enfance et de ma jeunesse militante , se dresse un autre visage .

Dans un post précédent , j'avais déjà détaillé son action belliciste en Italie fin 1914 et en 1915, pour que ce pays entre en guerre aux côtés des Alliés , son admiration pour les nationalistes irrédentistes italiens comme Mussolini et D 'Annunzio. (1)
Hubert Hedebouw dans son blog d'avril 2014 avait déjà publié de larges extraits des « Fondeurs de neige » http://hachhachhh.blogspot.be/2014/04/julien-lahaut-et-le-corps-acm-autos.html

En août 1917 , le gouvernement du Havre décide de le charger d'une mission en Russie : ministre de Belgique à Pétrograd. Il y est nommé par arrêté royal du 1er septembre 1917.
Le voyage du Havre à Petrograd via Londres, l'Ecosse, la Norvège puis Stockholm prenant 20 jours , il arrive quand sa mission n'a déjà plus aucun sens : pour ses amis du gouvernement provisoire tout est déjà fini
Et au lyrisme guerrier enveloppé d'un raisonnable drapeau rouge du « patron » du POB succédera à la mi- octobre, dans les salons de Petrograd, le chauvinisme feutré à la fois russophobe , et germanophobe , xénophobe en un mot, du « prophète inspiré » de Charleroi, et aussi un mélange de lucidité et d'aveuglement .(2)

Quoi qu'il en soit, en ce mois d'octobre 1917, alors que « le monde va changer de base » le prophète ne semble plus inspiré du tout ; il n' a manifestement pas l'air heureux de sa mission , mais reconnaissons qu'il a un réel talent littéraire pour transmettre sa vision noire et pessimiste .
Rien ne trouve grâce à ses yeux : le bateau, « médiocre vapeur » est « noir et puant », l 'émigré russe rentrant au pays , « banni misérable »a « un foulard sale autour du cou, cachant l'absence de linge, des vêtements minables et des chaussures de sport.
Petrograd, est un « cloaque infâme », la foule de « pauvres gens y est sordide », et les popes ...
Mais lisez plutôt :

« Petrograd ne me plaît pas. Je n'y suis pas venu en touriste ni en voyage de plaisir, je le sais bien, mais mes yeux n'ont pas renoncé à trouver à l'étranger les joies précieuses que peuvent donner les visions différentes de celles auxquelles on est habitué. Je les
cherche vainement ici....
Misère et saleté. Telles sont les impressions d'arrivée.
Petrograd est, dans cette arrière-saison, un cloaque infâme. Une boue liquide, gluante, couvre les rues et les trottoirs. Elle a jailli sur les fenêtres des étages inférieurs, elle s'étale dans les ornières, elle gicle traîtreusement sous le pied qui se risque à peser sur un pavé déchaussé.
Jamais je n'ai rien vu d'aussi ignoble, sauf certaines rues fangeuses de Constantinople.
La foule est innombrable et sordide.C'est une foule de pauvres gens, voilà tout. On y voit surtout des soldats oisifs,croquant des graines de tournesol. Si on regarde bien,on aperçoit de temps en temps, un type très accusé de juif, de chinois, de moujik.

 Parmi toute cette crapule, la palme est, sans contredit, aux popes. Avec leur longue robe crasseuse et luisante, aux manches évasées, leurs cheveux longs et leur barbe en désordre, ils évoquent vraiment le maximum de la malpropreté pouilleuse, graisseuse et mal odorante. »(3)   

Ajoutons y sa rencontre avec KERENSKI, le chef du gouvernement provisoire, auquel il présente des lettres de créance, à quelques jours de sa chute , le 26 octobre:

« Et lui, eh bien , il est extrêmement déplaisant. Les traits sont ronds et bouffis, d'expression vulgaire ; les yeux sont petits, fureteurs et fuyants. Il n'y a, dans ce regard-là, ni intelligence, ni générosité, mais simplement de la ruse et de la fourberie .

Maintenant que je l'ai vu, je crois plus facilement à ce qu'on m'a dit de son manque de sincérité, de son verbalisme, de sa jalousie féroce contre tous ceux qui semblaient menacer sa popularité.»(4)   

D'ailleurs , son jugement ne sera pas plus favorable au nouveau président bolchévik du Conseil des commissaires du peuple, Vladimir Lénine, qu'il rencontrera au palais Smolny le 14 janvier 1918.

« Nous pénétrons chez Lénine.
LENINE EN 1918
Il est là, accueillant, souriant, visiblement satisfait de la visite. C'est un homme jeune encore, court, robuste, blond, d'apparence vulgaire.
La mise est simple, presque négligée, celle d'un contremaître qui ferait des écritures. Le poil est blond : cheveux, moustache en perpétuelle agitation, et très dessinées sur les tempes, et barbiche, la tête ronde est massive, comme un boulet enfoncé sur les épaules, le nez écrasé et rond du bout, les yeux petits et fuyants sous des paupières en éventail, des rides en pattes d'oies qui s'ouvrent et se déploient comme si elles participaient au clignotement des paupières et au sourire des lèvres.
Les manières sont communes; impression générale : un homme du peuple, quelconque, où il y aurait du Mongol et du Boche »(5)

Le décor est planté : l'Ambassadeur de Belgique n'aime ni la Russie,ni les Russes,ni les dirigeants russes,  bolcheviks ou non; plutôt gênant pour un  diplomate  dont la mission serait de gagner leur raison et leur coeur pour les appeler au sacrifice suprême !
Seuls auront grâce à ses yeux le ministre des Affaires Etrangères du gouvernement provisoire :
«  distingué ,parlant le français ,accueillant, charmant, [...] un Occidental qui me donne l'impression que je suis à Londres ou Paris »
Même Trotski qu'il admire pourtant sera qualifié de « juif rusé »                                                 Remarquons par ailleurs le contraste avec l 'appréciation qu'il avait portée sur Mussolini 3 ans plus tôt.(6)

« QUI A CESSE D' ETRE SOCIALISTE ?  »

Mais ce qui est plus étonnant, c'est que , Destrée qui , comme toute la direction du POB – excepté Camille Huysmans - est un farouche partisan de la guerre jusqu'au bout, ne peut cacher ses doutes, et son trouble devant ce qu'il appelle « le défaitisme » – qui est en fait le refus de la guerre venant à la fois , au sein de l 'ex - Internationale  du « centre » pacifiste, et de la gauche révolutionnaire.
Le centre pacifiste, ce sont les initiateurs du projet d'une conférence pour la paix des socialistes à Stockholm, Camille Huysmans  ex - secrétaire de l'Internationale, les partis sociaux démocrates hollandais et scandinaves, soutenus par des socialistes français ( Longuet) ,anglais, suisses, le parti socialiste italien. Se joindront à eux la majorité des socialistes russes (les mencheviks et les socialistes révolutionnaires)
En Belgique ce courant restera minoritaire au sein du Conseil général du POB.
La gauche révolutionnaire, c'est les bolchéviks russes, les spartakistes allemands autour de Rosa Luxemburg et Liebknecht, d'autres groupes internationalistes allemands, des minoritaires ici et là Henriette Roland Holst, Henri Guilbeaux etc.

Sous le paragraphe « Socialisme et défaitisme. »Destrée s'interroge :
Comment se fait-il que dans une lutte intéressant si profondément les masses, de l'issue de laquelle dépendait si évidemment la liberté du monde, l'impérialisme militariste allemand ait recruté des complaisants, précisément parmi les socialistes.
Il y a eu, en Russie, des révolutionnaires défaitistes avérés, depuis le premier jour.
Le parti socialiste officiel italien, les minoritaires français, l'Independent Labour Party en Angleterre, et même certains socialistes belges, et encore des socialistes neutres de Suède, de Hollande et des pays Scandinaves se sont prononcés contre la guerre, ont souhaité sa fin à n'importe quel prix, ont cherché des excuses aux Allemands,ont affaibli l'esprit de résistance, ont préconisé des mesures qui ne pouvaient profiter qu'aux agresseurs.
STOCKHOLM 1917 :
MANIFESTATION SOCIALISTE POUR LA PAIX
Deux infirmités morales peuvent expliquer le défaitisme : la lâcheté et la vénalité.
Accuser ceux qui n'adoptent pas les points de vue officiels d'être, soit des lâches, soit des
vendus, est facile, mais un peu sommaire.
Reste toujours à savoir pourquoi, une fraction importante du parti socialiste qui, dans son ensemble, ne peut être considérée comme couarde ou achetée, a déserté la lutte contre le militarisme allemand et écouté avec faveur les campagnes défaitistes.
Je vois bien la part de l'Allemagne dans des manifestations comme Kienthal, Zimmerwald (7a) ou Stockholm (7b)
Mais, j'avoue ne pas me résigner à n'y voir que l'Allemagne.
Il y a aussi une part de socialisme. Un socialisme bien inattendu, j'en conviens, et bien différent de celui que nous imaginions en 19l4.

Et de se poser la bonne question :
Qui donc, des défaitistes ou de nous, a cessé d'être socialiste ? Pour moi, j'hésite et l'antinomie m'obsède. »(8)

Tout son séjour en Russie sera traversé par cette interrogation :
Ministre de Belgique , de conviction jusqu'auboutiste , il est là pour prôner la continuation de la guerre jusqu'au bout.
Mais ayant des yeux et des oreilles, il comprendra très vite que c'est peine perdue, « mission impossible » , que les Russes veulent la paix immédiate

« C'est donc pour la paix et contre la guerre que s'est faite l'union des esprits.
Dès maintenant, virtuellement, la Russie trahit l'Alliance.
Les membres du Gouvernement provisoire y mettent des formes, ils comprennent
que leur honneur international exige la guerre et que leurs électeurs exigent la paix, et ils cherchent la conciliation de ces extrêmes.
Mais les journaux et les partis ne s'embarrassent pas de ces tactiques savamment équilibrées.
La volonté de la paix est chaque jour plus impérieuse et plus catégorique.
Pourquoi les Alliés s'obstinent-ils à continuer la lutte, puisque la Russie en a assez ? »(9)

Le capitaine Jacques Sadoul , membre de la mission militaire française en Russie, présent à Petrograd
Capitaine Jacques SADOUL
à la même époque , et qui se ralliera à la révolution   exprimera cela de façon très claire :
« Le désir d'une paix immédiate, à tout prix, est général ;
Sur ce point, tous les Russes que j'ai vus, sans exception sont d'accord avec les bolcheviks et séparés seulement les uns des autres par une différence de netteté, disons le mot, d'honnêteté dans l'expression de ce voeu : la fin de la guerre, coûte que coûte.
Que le peuple russe ait dans son ensemble le dégoût et la haine de la guerre, qu'il aspire ardemment à la paix, quelle qu'elle soit, qu'il ait pu apercevoir dans la Révolution un plus sûr moyen d'arriver à cette paix, tout cela me paraît aujourd'hui d'une évidence éclatante.
Je sais que telle n'est point l'opinion des représentants alliés.
S'ils ne comprennent pas, c'est qu'ils ne veulent pas comprendre. »(10)

«  LA BOUSSOLE PERDUE  »

Mais cet éclair de « lucidité » n'est qu'une face de Jules Destrée.
Décontenancé par la multiplication des tendances « socialistes » dont la plupart se prononcent en paroles du moins pour la paix sans annexion ,il regrette amèrement la disparition politique du parti de droite réactionnaire les « cadets » ( le parti constitutionnel démocrate de droite, représentant la bourgeoisie )
Seuls, les cadets (constitutionnels-démocrates K. D.)ont osé résister au courant. Considérés comme subversifs il y a un an, ils sont maintenant à l'extrême droite.
Le parti de la Liberté Populaire est le parti bourgeois, semblable aux partis libéraux ou progressistes d'Occident ...
Les cadets comptent dans leurs rangs des personnalités éminentes de l'Université et du Barreau : Milioukoff,[... ] Ils soutiennent avec loyauté le gouvernement provisoire.
Dans tout autre pays, un parti ayant de pareilles ressources d'intellectualité, serait un des facteurs de l'évolution nationale.
Ici, les cadets sont peu écoutés et traités en suspects.La masse les accuse d'impérialisme et les traite de contre-révolutionnaires.
Où va ce navire, perdu dans la tempête, sans boussole pour marquer sa route et le mener au port ?(11)



Traduction de la note MILIOUKOV avril 1917
Mais qui était donc cette « boussole  perdue» « cette ressource d'intellectualité »?
Après février 1917, Milioukov, professeur d'université à Moscou, qui avait essayé de sauver la monarchie, devient ministre des Affaires étrangères du gouvernement provisoire et envoie , le 18 avril, une note aux gouvernements alliés dans laquelle il promet que la Russie continuera la guerre « jusqu’à la victoire finale » et « remplira tous les engagements pris envers nos alliés » et dés lors le respect des traités. Il n'était un secret pour personne qu'il « convoitait Constantinople et les Détroits »

 « Le 21 avril (4 mai), à l'appel du Parti bolchévik, les ouvriers de Pétrograd cessèrent le travail et manifestèrent pour la paix. Il y eut plus de 100000 manifestants, ouvriers et soldats. Des manifestations eurent lieu aussi à Moscou, dans l'Oural, en Ukraine, à Cronstadt. Des résolutions de protestation contre la note de Milioukov affluèrent des Soviets de nombreuses villes à l'adresse du Soviet de Pétrograd. Les manifestations d'avril marquèrent le début d'une crise politique. Sous la poussée des masses, les ministres Milioukov et Goutchkov furent forcés à démissioner .»
Et c'est eux que le ministre de Belgique regrette !Normal , puisque tous deux voulaient mener la guerre impérialiste  jusqu'à la victoire totale de leur camp.
On le voit, c'est plutôt lui qui en Russie n'a plus de  boussole, complètement désorienté par une situation politique qui lui échappe, tellement différente de l'ambiance d' Union Sacrée des salons de Londres , de Paris ou du Havre ,tellement opposée aussi aux appels à la guerre de Mussolini ou D 'Annunzio dans l'Italie de 1915 , qui l'avaient tellement enthousiasmé.



LES BUTS DE GUERRE DES ALLIES – LES TRAITES SECRETS

Mais ce qui est remarquable et est largement occulté, c'est que la volonté irrépressible de paix montant de toute la Russie, dépassait de loin le dégoût de la guerre , un simple rejet pacifiste ou la volonté des soldats de rentrer à la maison .
La prise de conscience politique de la nature impérialiste de la guerre s' était répandue en Russie.
Prise de conscience développée par la propagande léniniste, qui dés 1914 avait caractérisé cette guerre comme une guerre de brigandage pour le partage du monde, mais aussi par la publication des traités secrets signés entre les Alliés, dont la Russie tsariste.
Le mot d'ordre de « paix immédiate sans annexion, ni contribution » était devenu celui de tout le peuple russe, particulièrement après le choc de la note Milioukov.
Le peuple russe ne voulait plus se battre , ni pour une Constantinople russe, ni pour la Mésopotamie anglaise, ni pour le Liban français, ni pour aucune annexion impérialiste ... 
Sans doute est ce là une des leçons les plus marquantes de 1917. Toujours d'ailleurs d'une brûlante actualité!
Révélateur est à cet égard la conversation, fin octobre, entre Jules Destrée et un interlocuteur russe Skobeleff, dirigeant menchevik , ministre un temps du gouvernement provisoire , vice-président du Comité exécutif central pan-russe (VTsIK) issu du 1er congrès des soviets (juin 1917).

S : -Nous avons besoin de paix, plus qu'ailleurs, à raison des causes psychologiques (la Révolution) et matérielles (la crise de ravitaillement et des transports).
Pourquoi ne veut-on pas le comprendre et veut-on nous forcer à lutter ?

D:  - Il faut se battre, quand même, parce qu'il est des paix auxquelles on ne peut pas souscrire. 

S: - Il faut que les Alliés nous aident. Il faut qu'ils publient ce qu'ils veulent, qu'ils enlèvent à nos adversaires l'argument des traités secrets. En précisant clairement les buts de guerre.

Et en les limitant, comme les Soviets l' ont fait, à ce qui est équitable et démocratique. Quand je dis aux soldats qu'ils se battent pour la liberté belge, ils comprennent et restent à leur poste ; mais quand le bolchevik  vient les railler de risquer la mort pour que l' Angleterre conquière la Mésopotamie, ils ne comprennent  pas et s'en vont. 
Le silence prolongé de l'Entente accélère la décomposition russe. »(12)



Derrière les grandes paroles sur la liberté et la démocratie, sur la défense de la « pauvre  petite Belgique », se cachaient en fait des buts de guerre « inavouables » , définis très précisément dans des traités secrets .
Henri Barbusse écrit en juillet 1919 , en préface aux très intéressantes lettres de Jacques Sadoul :

« lls en sont responsables ( de la paix séparée entre la Russie et l'Allemagne ndlr), parce qu'ils n'ont jamais déclaré leurs buts de guerre. L'histoire n'aura malheureusement aucune peine à établir que les Alliés ont, pendant toute la durée de la guerre, honteusement caché les fins qu'ils poursuivaient.
C'est aux yeux des peuples, la tache dont ne se laveront jamais les gouvernements occidentaux, et qui, à jamais discréditera leurs manifestations verbales relatives au droit et à la justice.

On cherchera en vain, entre leurs paroles et leurs actes, ce rapport absolu qui s'appelle la loyauté[...]...nous savons trop aujourd'hui pourquoi les Alliés n'ont pas avoué leurs ambitions:    elles étaient inavouables. »(13) 

Mais les Soviets ont publié trois de ces traités et dés 1917, le monde entier en connaîtra les clauses
  •  l'accord secret sur Constantinople du 18 mars 1915, entre la France, l'Angleterre et la Russie accordait à la Russie le contrôle de Constantinople et des Dardanelles , principal but de guerre de l'Empire tsariste. Il fut publié par les Izvestia le 23 novembre 1917 .                                          
voir  https://archive.org/stream/secretagreements00buxtiala/secretagreements00buxtiala_djvu.txt
  • le traité secret de Londres signé le 27 avril 1915 entre la Russie, l'Angleterre, la France et l'Italie, publié par les Izvestia ,journal du Soviet des députés ouvriers et soldats de Petrograd  dés le 28 février 1917.                                                                                                                     
  •  les accords secrets Sykes - Picot du 16 mai 1916 entre la France et l'Angleterre , validés préalablement par la Russie tsariste le 26 avril 1916. Ces accords prévoyaient un partage de l'Empire ottoman ente les 3 grandes puissances alliées.
    Ils furent rendus publics par le nouveau gouvernement soviétique  appliquant ainsi leur engagement de «  procéder immédiatement à la publication complète de tous les traités secrets »(14)
  •  Les accords de Saint Jean de Maurienne du 20 avril 1917 , entre la France, l'Angleterre et l'Italie , complétaient les 2 traités précédents en précisant la part du gâteau réservée à l'Italie dans le dépeçage de l'Empire Ottoman. Le tsar ayant été renversé, et Milioukov chassé,  le  gouvernement provisoire russe n'aurait   jamais osé  entériner  cet accord .
Cette seule carte des accords de saint Jean de Maurienne illustre à elle seule, mieux que 100 discours, la vraie nature de la "Grande Guerre" . Le partage du monde et de ses richesses !
Et il serai bon  de l'inclure dans les programmes d'histoire de nos écoles.


« Les accords secrets conclus ainsi par les puissances en ce qui concerne leurs zones d’influence dans la Turquie d’après guerre ont été, après leur publication, dénoncés de différents côtés comme les preuves matérielles de l’impérialisme des États qui disaient mener la guerre pour le triomphe de la justice et la liberté des peuples. »

« LE RUSSE » EST UN IVROGNE ASIATIQUE , UN ENFANT BARBARE, SALE ET PARESSEUX, LACHE ET MENTEUR ...
Je ne peux vous faire grâce, ami lecteur des 20 pages ( pp155 à 175) des « Fondeurs de neige » intitulées « Psychologie populaire » où éclatent la xénophobie , l' arrogance intellectuelle du bourgeois occidental certain de sa supériorité .
Ce texte devrait être utilisé dans les bibliothèques que l'auteur a pourtant créées et dans les écoles dont il a pourtant été ministre, comme exemple de littérature encourageant la  xénophobie, bien opposés à 180 degrés aux idéaux universalistes du socialisme !
Je ne peux qu'être stupéfait que cet ouvrage , non pas anticommuniste , non pas antisoviétique, mais xénophobe et raciste ait pu être publié en 1920 à Bruxelles , alors que l'auteur, ancien Ministre de Belgique en Russie, était Ministre des Sciences et des Arts du gouvernement belge. Pauvre petite Belgique ; la honte ! Poor little Belgium! Shame!
  • "Ce peuple est dénué de génie créateur" J Destrée 
    Ce peuple a été longtemps empoisonné par l' alcool. L'alcoolisme est aux moelles de la race, chronique.Chacun sait qu'il a des répercussions lointaines héréditaires . A supposer que le Russe soit devenu sobre,il est fils et petit-fils d'alcooliques. Faut- il          s'étonner qu'il     manque d'équilibre? (15)
  • Le Russe dort tout habillé, où il peut,sur des tapis, sur un escalier. Il se couche tard, se lève plus tard encore. Il est remarquablement paresseux. Boire du thé et fumer des cigarettes lui paraissent les occupations essentielles de l'existence.
  • Le marquis de Custinne disait : »Ils ont une dextérité dans le mensonge, un naturel dans la fausseté dont le succès me révolte autant qu'il m'épouvante. »
  • Le sentiment de dignité est rare, et celui de la propreté,rare aussi, parce que le premier fait défaut.
    "Ce peuple est dénué de génie créateur" J Destrée 
    Timbre soviétique LEON TOLSTOI
  • Généralement les Russes manifestent leur intelligence par la manière d'employer de mauvais ustensiles[...]. Ce peuple ...est dépourvu de génie créateur. Ils ont tiré leurs sciences et leurs arts de l'étranger. Ils ont de l'esprit, mais c'est un esprit imitateur. » (de Custinne.)
  • Ils sont très courageux, j'en conviens, quand ils sont à dix contre un. Mais c'est un genre de courage que j'apprécie peu.
  • Européen, hypocrite lecteur , mon semblable, mon frère .Il fut un temps où, toi aussi, tu étais bavard, imprévoyant, gaspilleur, brave et lâche à la fois, bon et cruel par intermittences, ignorant, imitateur et vaniteux ; ce fut quand tu avais de six à dix ans. En réalité la psychologie populaire russe est une psychologie puérile.
  • « Demain comme hier, la Russie reste un sujet d'inquiétude pour l'Europe. » !!(Jules Destrée 1920, Paul Henri Spaak 1946, François Hollande 2016 ?                                                                                                                                                                                                                                             Après telle lecture, la réponse à la question « Qui a cessé d'être socialiste ?» , vous semblera évidente ,non ?

LES BUTS DE GUERRE DE JULES DESTREE ?

Le bilan de sa mission en Russie est nul ,  d'une part de par l' aveuglement idéologique anti bolchévique de Mr l'Ambassadeur,  qui est réel, mais – il y avait encore plus aveugle que lui - surtout   de par le  blocage du gouvernement belge du Havre au diapason des impérialistes  français et  anglais;  alors que Destrée , en diplomate responsable quand même, quémandait au Havre de pouvoir établir des contacts avec le gouvernement de Lénine, la réponse invariable était « d'éviter tout contact avec le gouvernement actuel . »(16)
Jacques Sadoul décrira cette politique :
« Nous persistons à nier que la terre tourne, c'est-à-dire affirmer que le gouvernement bolchevik n'existe pas. »
" Cette action ( des Alliés)  infiniment simple et imaginée sans efforts consiste essentiellement à maintenir inébranlablement l'attitude adoptée à l'égard des leaders bolcheviks et spécialement de Lénine et Trotzky :
Ces hommes sont des agents de l'étranger. La dignité des Alliés leur interdit d'engager avec ces individus une conversation ..." (17)

Notons cependant que, malgré son inefficiente ouverture diplomatique, Jules Destrée lui même , tout au long de son livre, sussurera la même thèse : le soir de la prise du palais d'Hiver,il avait écrit
« Le coup d'Etat est donc accompli. Il n'y a plus d'autorité. Cela presque sans combat. Il n'y a que quelques morts et blessés, et le pillage du Palais d'Hiver.
C'est peu pour une telle secousse. L'impression générale est la stupeur. Tant d'audace, de méthode, d'organisation déconcertent. C'est trop fort pour être russe, me dit un Russe, il doit y avoir de l'allemand là-dessous. »(18)

Jules DESTREE
Il quitte la Russie , sans aucun résultat diplomatique en avril 1918 via Vladivostok.
Il est , en chemin, chargé d'une ambassade à Pékin en hiver 1918 et puis rentre au pays .
Il se présente à Charleroi aux élections de novembre 1919 , comme député sortant POB  , est élu ,et est nommé Ministre des Sciences et des Arts.
Comme  ministre , il réformera l’École normale pour améliorer la qualité de l’enseignement primaire, augmentera le salaire des instituteurs en plaçant sur le même pied les hommes et les femmes, et augmentera le nombre et le montant des bourses d’études. Il introduira aussi un cours de morale au programme de l'école primaire .
Il sera l'auteur de la loi de 1921 sur les bibliothèques favorisant leur ancrage public,et l'accès au livre gratuitement et pour tous.
Beau bilan, incontestablement.

Mais me direz vous au terme de cet épisode de ces « Aventures au pays des soviets » ,  Destrée, s'il était aveuglé par son jusqu'auboutisme et voulait, accroché au char anglo-français ( et italien), battre militairement l'impérialisme allemand , au moins était - il mu ,lui, par un patriotisme sincère , par la volonté de chasser et de vaincre « les Boches », qui avaient en violant sa neutralité, envahi le pays , massacré , martyrisé et affamé ses populations civiles .
Il n'avait pas lui même , ni ses amis socialistes de visées annexionnistes pour leur pays;
il se battait « pour la liberté belge » bafouée , comme il l'avait proclamé avec Vandervelde , 3 ans durant , de Rome à Petrograd.
Et bien détrompez vous cher lecteur !

Appel aux annexions du Comité de Politique Nationale
De retour au pays, il avait politiquement adhéré au très nationaliste « Comité de Politique Nationale »  .
Le Comité de politique nationale vit le jour le 18 décembre 1918 à l'initiative de personnalités très à droite comme Paul Nothomb. 
II regroupait, à ses débuts, des hommes appartenant à tous les milieux politiques et prônait une extension du territoire de la Belgique au détriment de l'Allemagne , mais aussi du Luxembourg et des Pays-Bas. Son objectif était donc de jouer un rôle en politique étrangère ,d'influencer le gouvernement  en prévision de la conférence de paix de  Paris et du futur traité de Versailles, avec des buts d'annexion
Comité de Politique Nationale Bulletin d'adhésion
Le gouvernement avait  l'ambition de réunir au royaume la Flandre zélandaise, le Limbourg néerlandais, les Cantons de l'Est et le grand-duché de Luxembourg.Notons en passant que les Pays bas dont on voulait amputer le territoire était neutre dans la guerre!! 
Albert Ier, qui était opposé à une trop grande humiliation de l'Allemagne, intervint lui-même à la conférence. Il réclama des indemnités de guerre et la révision du traité des XXIV articles concernant le statut de l'Escaut.
En vain ; la Belgique  ne reçut "que"( sic) les cantons d' Eupen ,Malmédy et Saint - Vith,  et  en Afrique le Ruanda -Urundi.

Jules Destrée ne quitta le Comité que sur injonction de son parti qui "ne peut tolérer, après 1920, l'adhésion de socialistes au Comité de Politique nationale dont les idées étaient devenues conservatrices". Parmi les autres socialistes membres de ce comité, on retrouve Richard Dupierreux et Louis Piérard. *19







Ainsi se terminent "Les aventures d' Emile et Jules au Pays des Soviets".
  Disons , en conclusion que ce n'est pas une page des plus glorieuses de la direction du Parti Ouvrier Belge ,et  qu'en place d' un socialisme fraternel,  internationaliste et universaliste , elle nous  montre , hélas , un visage de chauvinisme , de bellicisme  de nationalisme étroit voire de xénophobie des plus rebutant.

NOTES
1Voir « ROUGEs FLAMMEs « JULES DESTREE EN ITALIE https://rouges-f:lammes.blogspot.be/2014/07/1914-1918-uomini-contro-et-un-homme.html
2Prophète inspiré : voir Aimée BOLOGNE LEMAIRE dans GEORGES JACQUEMIN - JULES DESTREE . Service du Livre Luxembourgeois 1999 http://www.servicedulivre.be/servlet/Repository/Jules_DESTRÉE.PDF?IDR=5386

3 Jules Destree « Les Fondeurs de Neige – Notes sur la révolution bolchevique à Petrograd pendant l'hiver 1917-1918 »  Van Oest 1920 pp 27-33

4Ibid p 67

5Ibid p 243









6 « Petit homme noir, paraissant la quarantaine, moustache noire,très vif, mais regards fuyants, il appartient à cette forte race romagnole dont les qualités de probité, de travail et de démocratie passionnée se sont imposés dans divers domaines de l'intellectualité italienne. » J. DESTREE« En Italie avant la guerre » (cité dans P. DESTATTE RHB p.572) 
texte intégral pp 31- 35:   http://bd.fondazionegramsci.org/bookreader/libri/ST._2_360_En_Italie_avant_la_guerre.html#page/1/mode/1up







8Jules Destree op cité pp 7-10
9Ibid p 47



10Capitaine Jacques Sadoul NOTES SUR LA RÉVOLUTION BOLCHEVIQUE (OCTOBRE 1917 -JANVIER 1919) Editions de la Sirène Paris 1919 https://archive.org/stream/notessurlarvol00sadouoft/notessurlarvol00sadouoft_djvu.txt
11Jules Destree op cité p 51

12Ibid pp 73-74

13Capitaine Jacques Sadoul op cité: préface de Henri Barbusse p 9

14Sur les accords secrets : voir3) Les accords secrets interalliés sur la Turquie et leur modification pendant la Conférence de la Paix http://www.imprescriptible.fr/mandelstam/c8/p3 et ROUGEs FLAMMEs https://rouges-flammes.blogspot.be/2015/01/je-suis-lawrence-1914-1918-grande.html et https://rouges-flammes.blogspot.be/2015/05/1914-1918uomini-contro-mai-piu-vogliam.html

15Jules Destrée op cité : toutes les citations suivantes « Psychologie populaire » (sic) pp 155-175

16Jean Stengers : « Belgique et Russie, 1917-1924 : gouvernement et opinion »  Revue belge de philologie et d'histoire  Année 1988 Volume 66 Numéro 2  http://www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_1988_num_66_2_3628

17Capitaine jacques Sadoul op cité

18Jules destrée op cité p 89
19 voir Michel Dumoulin :"Nouvelle histoire de Belgique: 1905-1950"pp 35-40

vendredi 3 novembre 2017

OCTOBRE 1917 : LES AVENTURES D' EMILE VANDERVELDE ET JULES DESTREE AU PAYS DES SOVIETS (1)

Soviet des usines Poutilov petrograd

Nous commémorons en ce début novembre 2017 le centenaire de la révolution russe de 1917.
L'émergence de l'Union Soviétique suite à la révolution d'Octobre m'a marqué dés mon enfance :
mon père Arthur Tondeur (1), a été , après la guerre , secrétaire pour la région de Charleroi des Amitiés Belgo – Soviétiques.
Mes souvenirs d'enfance sont émaillés d'images de rencontres avec des invités soviétiques ( musiciens, artistes , professeurs) ; leur langue douce et chantante résonne encore dans mes oreilles.
Mon père organisait aussi des projections de films soviétiques dans la région ; nous avions ainsi le privilège de voir en « avant première » , en VO ,le dimanche à la maison ,tel ou tel film , distribué par Progrès – Films. Je me souviens par exemple de la trilogie autobiographique de Maxime Gorki , « Ma vie d'enfant » , « En gagnant mon pain », « Mes Universités » du réalisateur Marc Donskoï.  
Et d'un autre film dont le titre était « Stalingrad »...
Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis, et l'Union Soviétique s'est effondrée il y a 25 ans. 
Mais 1917 restera toujours pour moi, la référence d'une rupture radicale avec le capitalisme d'un peuple qui, classe ouvrière en tête, s'est dressé pour son émancipation.
C'est pourquoi en ce centenaire , je ne résiste pas à l'envie de vous faire partager, cher lecteur quelques lectures de circonstance : les témoignages écrits de 2 personnalités de chez nous dont tant de rues , de places publiques et d'écoles portent le nom.
Témoignages contradictoires de 2 célébrités social démocrates, faits à la fois de beaucoup d'aveuglement et de préjugés , mais aussi d'un peu de lucidité, et qui méritent , à mon avis, d'être connus.
Emile Vandervelde voyage en Russie du 18 mai au 25 juin et il   écrira : « Trois aspects de la révolution russe . 7 mai – 25 juin 1917» (2)
Jules Destrée est ministre de Belgique à Petrograd de la mi octobre 1917 au printemps 1918 et écrira « Les Fondeurs de Neige – Notes sur la révolution bolchevique à Petrograd pendant l'hiver 1917-1918 ; »



Les intérêts de la bourgeoisie belge en Russie avant la Révolution sont énormes mines de charbon, sidérurgie, métallurgie, - avec une forte concentration dans le bassin du Donetz - , verrerie, chimie , tramways , production d'électricité . La Belgique petit pays impérialiste , est le plus grand investisseur étranger en Russie ,rapporté à l'importance de sa population.
Mais , plus peut être que les intérêts économiques de leurs amis capitalistes, ce sont les intérêts
politiques qui guident le gouvernement du Havre et la monarchie dans leurs relations avec la Russie révolutionnaire : la pousser et l'encourager , à tout prix , à continuer la guerre.
Et les mieux placés pour se faire , ce sont les dirigeants du Parti Ouvrier Belge (POB), comme ils l'avaient été en Italie (3) pour faire pression sur le Parti socialiste italien et pour soutenir, y compris financièrement , le dissident jusqu'auboutiste Benito Mussolini .
Le tsar est tombé, les sociaux démocrates mencheviks, et les socialistes révolutionnaires de Kerenski participent au pouvoir dans le gouvernement provisoire de Petrograd . Tous rejettent une politique de rupture de la Triple Entente avec le Royaume Uni et la France.
Le discours social chauvin présentant la boucherie impérialiste , guerre de brigandage pour le partage du monde , comme une guerre sainte de la liberté, de la civilisation et de la démocratie ( « les droits de de l'homme » dirait on aujourd'hui) contre les autocraties, les barbaries des Empires Centraux , prend selon les chefs du POB tout son sens dés lors que « la tache » de l'alliance avec l'autocratie tsariste est effacée.
L'historien Jean Stengers décrit ainsi l'attitude d'Emile Vandervelde , le leader du POB :


«Nous luttions pour les libertés du monde et nous avions pour allié l'empereur de toutes les Russies. Nous luttions pour le droit des peuples, et on pouvait nous opposer la Pologne ou la Finlande».
Grâce à la révolution de février, s'écrie Vandervelde, «cette équivoque a pris fin» . C'est dire qu'il va saluer avec enthousiasme la révolution et la nouvelle «démocratie russe». Désormais, déclare-t-il, l'on pourra apercevoir, «dans sa clarté éblouissante, la portée de la lutte suprême qui met aux prises les peuples du monde entier. D'un côté toutes les autocraties, de l'autre toutes les démocraties» (4 )

C'est dire si la révolution de février a été reçue par eux comme du pain béni
C'est donc le 18 mai 1917 que trois dirigeants de premier plan plan du POB arrivent en Russie : Monsieur le Ministre Vandervelde, Louis De Brouckère et le lieutenant Henri De Man.
Avec un triple but :
  • S'opposer , avec les autres socialistes de l'Entente , les français et les anglais , à une paix séparée ou à toute tendance à la paix à tout prix.
  • Appeler à la solidarité avec la Belgique ( the poor little Belgium) et avec les travailleurs belges dans leur lutte contre l'impérialisme allemand.
  • Prendre attitude auprès des sociaux démocrates russes vis à vis des projets de conférence de Stockholm pour une paix négociée - en fait les amener à renoncer à toute conférence pour la paix et à les convaincre du crédo jusqu'auboutiste « le chemin de la paix passe par la guerre » !



TEMOINS DE LA REVOLUTION A PETROGRAD

Cependant , avant d'entamer leur périple guerrier sur le front, les trois compères visitent Petrograd, le Soviet , alors encore dominé politiquement par leurs amis mencheviks et socialistes- révolutionnaires, ils marchent dans les rues , visitent sept usines à Petrograd , des coopératives à Moscou.
Et le récit d'Emile Vandervelde ( 2) ne manque pas d'intérêt , comme témoignage de ce bouillonnement révolutionnaire qui traverse le peuple russe, qui , comme une éruption volcanique, surgit d'en bas , du plus profond des masses ouvrières et populaires.

« Il faut avoir vécu de telles journées, pour savoir ce qu'est l'enthousiasme des premières semaines d'une grande Révolution.
Au Champ-de-Mars, où les morts de la Révolution ont été enterrés, des cortèges défilaient,chaque dimanche, du matin au soir, apportant des fleurs et des couronnes d'immortelles. Sur la Perspective Newsky, où même à la Novoïe Vremia, même au Crédit Lyonnais ou a la Banque de Sibérie, on avait arboré le drapeau rouge, des foules en fête se pressaient, pour le seul plaisir de fraterniser, d'improviser des réunions, d'acheter des livres, défendus hier encore, de respirer enfin l'air de la liberté. »

« Au Conservatoire, à la Maison du Peuple, dans les théâtres impériaux, on donnait, sans relâche,
des concerts-conférences,où la musique presque toujours était excellente et où des milliers d'auditeurs acclamaient, jusque très tard dans la nuit, les principaux orateurs de la Révolution.
Il eût été difficile, au surplus, de dire à qui allaient les préférences politiques de l'Assemblée.
Maximalistes et minimalistes, bolcheviki et mencheviki, léninistes et partisans de Kerensky
ou de Plekhanoff, se succédaient à la tribune. » (5)

Le soviet de Petrograd


Ils situent la structure industrielle de la Russie et de Petrograd en particulier, de même que la force de la classe ouvrière ouvrière dans ces mois du printemps 1917, qui expliquent beaucoup sur le caractère prolétarien et l'issue victorieuse de la révolution en octobre.

« On pourrait trouver dans d'autres coins du monde quelques usines plus gigantesques encore que les ateliers de construction Poutiloff. Mais nulle part, du moins dans les faubourgs d'aucune grande capitale,on ne compte un nombre aussi imposant d'établissements monstres, et on ne trouve une pareille masse de prolétaires travaillant pour le compte d'une aussi faible poignée d'employeurs. »

« Les ouvriers des usines étaient à ce moment les maîtres de la Russie. Ils l'étaient dans toute la force du terme.
Le Soviet qui les représentait, en même temps que la garnison, constituait le seul pouvoir politique capable de se faire écouter du pays, et eux seuls disposaient de la force, par leur milice, par leur association étroite avec les soldats, par leur cohésion surtout et leur propension à agir de concert.
Il n'y avait ni police ni garde d'aucune espèce ; il n'y avait pas non plus d'autorité régulière, d'autorité morale reconnue, d'autorité traditionnelle subsistante, pour s'opposer à leurs volontés.»

Ils décrivent l'émergence dans les usines des comités d'usine et des comités d'atelier , les soviets ouvriers, élus au suffrage universel, et les compétences qu'ils se sont données, dans cette période de double pouvoir :

On trouve dans la plupart des établissements un Comité d'usine élu au suffrage universel des travailleurs des deux sexes, sans distinction d'âge, d'ancienneté ou de capacité technique, sous le régime de l'égalité la plus absolue.
Il contrôle toute l'activité de l'établissement [...]non plus dans l'intérêt des actionnaires, mais dans celui des ouvriers. Il s'intéresse moins aux conséquences financières de l'exploitation qu'aux conditions de travail qu'elle crée. La différence principale consiste en ceci que les « recommandations » des travailleurs sont, dans les circonstances actuelles, bien plus impérieuses que celles des actionnaires et qu'il est autrement plus difficile de les éluder. »

«  Les comités d'atelier : on en trouve dans tous les ateliers importants.
Ils sont élus, comme les précédents, au suffrage universel.
Ils exercent le pouvoir disciplinaire en lieu et place du contremaître. Ils ont en général le droit exclusif d'embaucher,de débaucher, d'admonester et de punir. Le contremaître n'exerce plus qu'une autorité technique. » 

Ils décrivent la soif révolutionnaire d'égalité et de partage des compétences qui balaie les usines , le combat aussi contre les contremaîtres despotes notamment dans les entreprises contrôlées par les capitalistes étrangers :

« Tel ingénieur fut obligé de prendre pour de longues semaines la place d'un manoeuvre.
Dans certaines mines du Donetz, tout le personnel des bureaux, le directeur- gérant compris, dut descendre à la fosse et connut expérimentalement les douceurs de l'abattage, tandis que des mineurs, dont certains étaient illettrés, siégeaient gravement dans le fauteuil directorial, sur la chaise haute du comptable ou autour de la table du Conseil d'administration. »

« Il ( le contremaître ) est presque toujours mal vu[ ...]à fortiori , quand il est brutal, quand il est injuste, quand il abuse de son pouvoir, très étendu en somme, pour favoriser ses créatures ou rendre la vie impossible à ceux qui se refusent à faire le sacrifice de leur dignité d'homme.
[...]le contremaître expert et exercé dominait son monde [...] enfin et surtout, parce que, une proportion considérable des surveillants et techniciens étaient des étrangers, Anglais, Français ou Belges, un peu trop tentés, dans la naïveté de leur orgueil national, de considérer leurs hommes comme les représentants d'une humanité inférieure et de se conduire comme des « civilisateurs » aux colonies. »

Bien sûr, ce reportage du plus grand intérêt,  transmettant, on peut le supposer, assez fidèlement la réalité révolutionnaire des usines , est émaillé de considérations raisonnables sur la « bonne volonté réciproque, chez les patrons comme chez les ouvriers, qui fera que la Russie échappera au chaos industriel » ; traversée aussi par cette   arrogance des     socialistes des pays développés d'Occident  sur l'improbable « révolution  sociale telle     que   prévue par les théoriciens du socialisme »:

« La Révolution ouvrière suppose des conditions positives, constructives ; elle exige une capacité industrielle et politique dont le prolétariat urbain de la Russie n'a pas encore fourni la preuve et qu'il ne saurait acquérir en un jour." (sic)


Il n'empêche, il met en évidence la vague de fond ouvrière et populaire , la soif de révolution traversant toute la société russe, qui finalement porta les bolchéviks au pouvoir grâce à leur fermeté sur les principes , grâce à leur programme – le paix, le pain et la terre – le seul répondant aux aspirations des masses les plus larges de la classe ouvrière et de la paysannerie , et à leur maîtrise tactique des réactions à l'évolution politique des événements , rapide, faite d'avancées et de reculs .


VANDERVELDE &Co : « PREDICATEURS DE LA GUERRE SAINTE »

1917 VANDERVELDE  s'adressant aux soldats russes pour continuer la guerre.

Passons maintenant à l'étape militaire , but principal de leur voyage
Savourons , avec stupéfaction quand même  dans ce cadre, cet « éloge de la guerre » présentée comme une guerre sainte, salvatrice de la révolution :
Vandervelde reprend à son compte ces horribles lignes sur la guerre, qu'il attribue de façon énigmatique à George Bernard Shaw  , pourtant, par ailleurs, pacifiste britannique et plus tard ami de l'Union Soviétique.
 »[...] Pour avoir un gouvernement uni et omnipotent, il faut commencer par avoir une guerre. Si la Révolution veut être délivrée de la réaction et si la République russe veut éviter de s'effondrer par le mécontentement de la asse ouvrière, le gouvernement révolutionnaire doit se fortifier par la guerre.[...]
Un hasard providentiel épargne aux dirigeants de la Russie l'horrible nécessité de provoquer cyniquement une guerre pour sauver le pays . La guerre est toute faite pour eux ,[...] et la Révolution l'a transformée d'une guerre dynastique pan-slave en une croisade pour la liberté et l'égalité dans le monde.
Et c'est dans cette guerre sainte que réside le salut de la Russie délivrée de l'anarchie »

Vandervelde poursuit :  
« C'est en prédicateurs de cette guerre sainte que nous allions sur le front.
Notre voyage ne devait être ni une excursion d'amateurs, ni un simple moyen de satisfaire notre curiosité. Le généralissime Alexeieff qui nous y avait invités entendait que ce fut une véritable mission de propagande (5)
 
De g. à dr. le chef des ACM(6) ,Vandervelde , ?  , Henri de Man (en uniforme) et De Brouckère

Et de décrire les artifices utilisés par ces prédicateurs de mort , au cours des centaines de meetings tenus parmi les troupes russes pour les pousser au combat .

D'abord leur faire croire , avec des contes et légendes à dormir debout , comme à des enfants , que la poursuite de la guerre est la poursuite de leur révolution contre le tsar, alors que dés avant 1914, les gouvernements anglais et français qu'ils défendaient n'avaient pas hésité à s'allier aux Romanov et à signer avec eux des traités secrets de partage du monde.
Et n'était ce pas le même Emile Vandervelde qui, en octobre 1914, devant le refus des 2 fractions parlementaires bolchevik ET menchevik de voter les crédits de guerre à la Douma russe , avait appelé à « suspendre la lutte contre le tsar » ,pourtant 3ème tête du monstre de la légende ci dessous ?!

VANDERVELDE au corps belge en Russie des Auto - Canons Mitrailleuses (6)( Jezerna 12/06/1917)
La tyrannie en Europe est comme ce monstre dont parle une vieille légende. Il avait trois têtes. Chaque fois qu'un héroïque chevalier en abattait une, elle repoussait. Pour le tuer, il fallait les lui abattre toutes les trois. Eh bien ! le monstre du despotisme européen a également trois têtes.
Elles s'appellent Romanoff, Hohenzollern et Habsbourg. Ce sont celles du tsar de Petrograd, du tsar de Berlin, du tsar de Vienne.
Le peuple russe a abattu l'une des trois têtes. Mais prenez garde ! Elle repoussera, si vous ne
tranchez pas aussi les deux autres ! »
Ensuite combattre la fraternisation avec les frères soldats allemands ou autrichiens, qui se répandait dans les tranchées , et qui était encouragée par Lénine et les bolchéviks , encore une fois avec des contes pour enfants...

Les Allemands qui essaient de fraterniser avec vous sont comme le loup qui voulait manger
Chaperon Rouge. Le loup, pour tromper Chaperon Rouge, mit le bonnet de nuit et les lunettes de la grand'mère. Chaperon Rouge lui demanda : Pourquoi as-tu de si grands yeux,
grand'mère ?[etc.etc.] Et le loup dévora la trop confiante enfant. Eh bien ! prenez garde au loup allemand ! Pendant qu'il essaie de vous attirer par de belles paroles, il aiguise ses crocs pour mieux vous déchirer ! »

Et de décrire les « scènes d' enthousiasme inouïes. » :
Meeting de soldats à Tarnopol durant la visite de Vandervelde
«  Il n'est guère de grands meetings qui ne se soient terminés sans que, après des ovations sans fin entrecoupant les discours et appuyées par les musiques militaires jouant la Brabançonne et la Marseillaise, nous ne fussions portés en triomphe par les soldats. Le tout aux cris de «Vive la Russie libre ! Vive la Belgique ! Vive le socialisme ! Vive l'Internationale !» ...
En voyant ces masses de soldats, sous les plis des drapeaux rouges, aux inscriptions «Liberté, égalité, fraternité», «Vaincre ou mourir», «Mourons pour la liberté», «La Patrie est en danger», et aux sons de la Marseillaise, manifester leur volonté de lutter pour la liberté de leur pays et du monde, nous ne pouvions nous empêcher de nous reporter en pensée aux grandes journées de l'épopée française de 1792»

Et c'est là sans doute la mystification  la plus honteuse de la social démocratie belge : transformer cette guerre initiée avec l'autocratie tsariste – avec ses traités secrets de partage notamment du Moyen Orient - cette guerre de brigandage impérialiste , la maquiller en guerre révolutionnaire pour la liberté, comme les armées de la République partant au combat en 1792 contre l' intervention étrangère des prussiens et autrichiens afin de restaurer Louis XVI sur le trône !
Quoi qu'il en soit , les trois prédicateurs quittent la Russie, le 25 juin satisfaits d'eux mêmes et confiants, en paroles du moins, dans la réalisation de leur rêve : une révolution démocratique bourgeoise, installant de manière durable au pouvoir d'une république parlementaire à l'occidentale – comme chez nous- leurs amis réformistes mencheviks et socialistes – révolutionnaires , enveloppés dans le drapeau rouge et collaborant avec « les ministres capitalistes » , et surtout, bonheur suprême, continuant la guerre jusqu'au bout.
Alexandre Kerenski
Las ! Leurs prêches s'avéreront inefficaces ; l'offensive Kerenski, la dernière offensive russe dans cette sale guerre, début juillet 1917 est un échec total, des troupes refusant de monter au front.
La contre offensive des austro- allemands repousse l'armée russe en décomposition , dont les soldats , définitivement, refusent de « vaincre ou mourir » pour les marchands de canon.
Le vent a tourné ; la volonté de paix est  portée politiquement par les bolchéviks qui  deviennent majoritaires dans les Soviets  ; la situation mûrit pour l'insurrection .
Et ce fut Octobre...;et là commence une autre histoire!




LE DECRET SUR LA PAIX

Il apparaît de toute évidence à travers l'histoire de ces huit mois de révolution que la question politique décisive , centrale et unificatrice a été la question de la guerre et de la paix , tant l'aspiration à ce que cesse cet enfer de mort, de faim et de misère au seul profit des puissants, était inextinguible au sein des peuples de l'ex - empire tsariste qui ont compté 3,3 millions de morts civils et militaires et 5 millions de blessés.
Le décret sur la paix , signé par Lénine le 26 octobre (8/11) proclamait :

« Le gouvernement ouvrier et paysan, issu de la
révolution des 24 et 25 octobre, et qui s'appuie sur les
Soviets des ouvriers et des soldats et des paysans
propose à tous les peuples belligérants et à leur
gouvernement, de commencer immédiatement des
pourparlers relatifs à une paix juste et démocratique.
[...] à laquelle aspire la majorité écrasante
des travailleurs et des classes laborieuses, épuisées et
exténuées par la guerre, la paix que les ouvriers et les
paysans russes, après avoir abattu la monarchie tsariste,
n'ont pas cessé de demander de la façon la plus
catégorique, la paix immédiate, sans annexions et sans
contributions.
« Le fait de continuer cette guerre pour permettre
aux nations fortes et riches de partager entre elles les
nationalités faibles conquises, est considéré par le
gouvernement comme le crime le plus grand contre
l'humanité, et le gouvernement proclame solennellement
sa décision de signer immédiatement les conditions
d'une paix,mettant fin à cette guerre, aux conditions
indiquées ci-dessus, également équitables pour
toutes les nationalités sans exception. 
Le gouvernement supprime la diplomatie secrète,
en exprimant devant tous les pays sa ferme décision de
mener tous les pourparlers au grand jour, devant le
peuple et en procédant immédiatement à la publication
complète de tous les traités secrets[...]
« Le gouvernement propose à tous les gouvernements
et à tous les peuples de tous les pays belligérants
de conclure un armistice immédiat...»(7)


Les Izvestia publient le décret sur la paix le 27 octobre 1917 (9/11)
Décret pour la paix « qui ne manque pas de grandeur » comme le reconnaîtra Jules Destrée , quand ministre de Belgique à Petrograd, il en reçoit officiellement le texte de la part de Léon Trotski, commissaire du peuple aux Affaires Etrangères.
En notant avec lucidité : « Les bolchéviks ont promis la paix immédiate, reconnaissons qu'ils font ce qu'ils peuvent pour tenir parole. » (

Et c'est pourtant ce surgissement d'une lueur de paix dans cette longue nuit de malheur et de guerre, dont on parle le moins 100 ans après, entre les commémorations convenues et patriotardes du 4 août 1914 et celle encore à venir du 11 novembre 1918 .
Sans doute parce qu' il met en cause les engagements dans la « grande guerre de classe » de la plupart des gouvernements bourgeois (incluant des socialistes) européens et autres (anglais, français, belge, allemand , autrichien , italien , grec, portugais, ottoman, roumain, bulgare  , américain, japonais , chinois etc) et leur refus ( plus ou moins catégorique selon leur situation militaire du moment) de tout processus de paix.

A suivre... "Jules Destree , infatigable pélerin de la guerre "

(1) sur Arthur TONDEUR voir: ROUGEs FLAMMEs  ARTHUR TONDEUR  ( 1908 - 1999) TEMOIN DE « L'AGE DES EXTREMES »
 https://rouges-flammes.blogspot.be/2014/05/arthur-tondeur-boma-1908-menton-1999.html
(2) texte intégral :http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3723396
(3) sur l'intervention de Destrée en Italie : voir ROUGEs FLAMMEs : JULES DESTREE en ITALIE
https://rouges-flammes.blogspot.be/2014/07/1914-1918-uomini-contro-et-un-homme.html  
(4)Jean Stengers : Belgique et Russie, 1917-1924 : gouvernement et opinion publique
Année 1988 Volume 66 Numéro 2 pp. 296-328 
(5)toutes les citations suivantes sont extraites de  Emile Vandervelde « Trois aspects de la révolution russe . 7 mai – 25 juin 1917» :http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3723396
(6) sur le bataillon belge d'auto canon mitrailleuses, auquel appartenait Julien Lahaut voir 
(7) texte intégral dans Jules Destrée "Les fondeurs de neige" p184  
A lire aussi sur le POB et la guerre de 1914-1918:
Herwig Lerouge ;Le mouvement socialiste et la Première Guerre mondialeEtudes marxistes n°106
sur la conférence de Stockholm:
Maxime Tondeur :  Minoritaires socialistes — pacifistes, flamingants et révolutionnaires — contre la guerre études marxistes n°112http://www.marx.be/fr/content/%C2%AB%C2%A0des-hommes-contre%C2%A0%C2%BB-deuxi%C3%A8me-partie
sur la mission Vandervelde , voir sur le site de la VRT en néerlandais:  "Socialisten in de bres vóór de oorlog"  17/06/2017: http://deredactie.be/cm/vrtnieuws/14-18/1.3003201