mercredi 25 mai 2022

CHRONIQUES D'UNE GUERRE ANNONCÉE (4) E.PARISET - 1936-1939 : ESPAGNE ( NON - INTERVENTION, NEUTRALITÉ BELGE), CHINE, ÉTHIOPIE.


Ce quatrième et dernier fascicule des Chroniques d'une guerre annoncée de E. PARISET, nom de plume de mon père Arthur Tondeur (1908 - 1999), regroupe les articles, écrits pour le quotidien La Voix du Peuple, traitant  essentiellement de la Guerre d'Espagne entre juillet 1936 et avril 1939. 
Devant l'abondance d'articles couvrant une actualité quotidienne  de près de trois ans,     j'ai choisi de me focaliser sur l'aspect international du conflit, particulièrement maîtrisé par Pariset :  la politique de "non-intervention", pratiquée dès juillet 1936 par la France de Léon Blum et l'Angleterre, d'une part, et d'autre part, l'intervention massive en hommes et en matériel, sur terre, dans les airs et en mer, des puissances fascistes de l'Axe Rome-Berlin, la mise en veilleuse de la SDN.
Le blocus sur les livraisons d'armes, fondé sur un contrôle aléatoire des frontières et des ports, asphyxiait la République du Frente Popular, tandis que les CTV (Corpo di Truppe "Volontarie") italiens et la Légion Condor nazie, surarmés en chars, mitrailleuses et avions renforçaient les troupes franquistes des "Regulares" du Maroc espagnol et des légionnaires du Tercio.
Cette politique de "non-intervention" largement commentée dans les articles de Pariset s'inscrit dans la politique "d'apaisement", en fait de capitulation des capitales occidentales, ( Londres et Paris  donnent le tempo), face au bloc agressif italo-allemand, politique dont la dénonciation est au centre des fascicules précédents (fascicule  1&2 sur l'Autriche, la Tchécoslovaquie et Munich ; fascicule 3 consacré à l'année 1939).
Si elle est loin d'être la seule cause de la défaite républicaine, les causes internes étant toujours déterminantes, elle y a, incontestablement,  joué un rôle fondamental.
A la non intervention, répondait le combat héroïque du peuple espagnol, appuyé par l'engagement internationaliste des Brigades internationales, le mouvement mondial de solidarité, livraisons de vivres, de charbon, mais aussi d'armes clandestines, l'appui en tant qu' États des seuls Mexique et Union soviétique. 

L'intérêt particulier de cette sélection réside aussi dans les analyses par Pariset de la
politique étrangère  belge, menée de concert par le ministre- Premier ministre Spaak, et par le roi Léopold III, aussi bien  vis à vis de l' Espagne, que  plus généralement sur le positionnement "neutre", "indépendant" de la Belgique dans le concert des nations européennes, à la veille de IIe guerre mondiale.
Toutes les organisations, politiques ou syndicales, ont été secouées par ces années  d'Espagne  et,  le POB particulièrement, a vu en son sein l'affrontement entre sa  droite gouvernementale voire syndicale, et le mouvement venu d'en bas, antifasciste, internationaliste, de la solidarité  et du large soutien à l'Espagne républicaine.
Ces "Chroniques" abordent également, à travers quelques  articles, hélas trop rares, les agressions du militarisme japonais en Chine, et de l'Italie fasciste en Éthiopie,  permettant ainsi d'échapper à une approche européocentriste : la seconde guerre mondiale a d'abord germé en Asie (Mandchourie 1931), puis  en Afrique (Éthiopie 1935), avant de frapper aux portes de l'Europe, de Madrid à Vienne, à Prague et Varsovie, pour ensuite, de 1939 à 1945 enflammer le monde entier. 
Bonne lecture.

Texte intégral en pdf -200 pages

CHRONIQUES D'UNE GUERRE ANNONCÉE  - FASCICULE 4 -  E. PARISET (1933-1939. ESPAGNE ( NON - INTERVENTION, NEUTRALITÉ BELGE), SPAAK et le POB
CHINE, ÉTHIOPIE.



Version papier 
Comme les autres numéros, le fascicule 4 peut être commandé en version papier en cliquant sur ce lien et en remplissant le formulaire.
Ne pas oublier de renseigner votre adresse mail
 

 
 
Extrait
 PARISET 26/09/1936 VduP

"Nous ne de­mandons pas que le gouvernement belge envoie au gouvernement espa­gnol ses escadrilles et ses pilotes comme conti­nuent à le faire l’Italie, l’Allemagne et le Portugal. Nous demandons simple­ment la liberté pour l’Espagne démocratique de se procurer dans le com­merce les armes, les munitions, les engins dont elle a besoin".

« Dans les premiers jours de la guerre civile, nous possédions plus d'avions que les rebelles. Aujourd'hui, après deux mois de « neutralité », ils ont une aviation supé­rieure à la nôtre dans la proportion de 12 à 1 ». Rien ne souligne mieux que cette déclaration du ministre de l'Air du nouveau gouvernement espagnol, le socialiste Prieto,[1] l'effroyable duperie que constitue la po­litique de « neutralité » dont le Gouvernement Léon Blum a pris l'initiative à l’instigation des « "Die-Hards2]" britanniques. Cette politique a été chaleureusement accueillie, au nom de la paix internationale, par tout ce que notre pays compte de réactionnaires et de fauteurs d'aventures.

Notre gouvernement d'Union Na­tionale qui prête trop souvent une oreille complaisante à leurs injonc­tions s'est empressé de s'y rallier sans réserve. Lorsque, par des faits évidents, nous montrons qu'elle revient à un blocus unilatéral du gou­vernement régulier d'une nation amie on nous répond que nous prê­chons l’intervention et la guerre. Non, non et non ! Nous ne de­mandons pas que le gouvernement belge envoie au gouvernement espa­gnol ses escadrilles et ses pilotes mi­litaires comme l’ont fait et conti­nuent à le faire l’Italie, l’Allemagne et le Portugal. En dépit de leur « adhé­sion » au principe de neutralité, ni Hitler, ni Mussolini n'ont rappelé les officiers italiens et allemands qui participent à la guerre dans les ar­mées du rebelle Franco. En fait, les gouvernements de Rome et de Berlin font au gouvernement constitu­tionnel de Madrid une guerre non déclarée.

Nous ne demandons pas qu'on les imite, nous ne demandons pas l’intervention de la Belgique démocratique en faveur de l’Espagne démo­cratique. Nous demandons simple­ment la liberté pour celle-ci de se procurer normalement dans le com­merce les armes, les munitions, les engins dont elle a besoin pour ma­ter une minorité de factieux que hait l’immense majorité du peuple espagnol. Et nous ne pouvons que nous étonner de l’étrange « neutralité » qui consiste à suspendre la con­vention commerciale entre l’Espagne et la Belgique, en invitant indus­triels et commerçants à refuser tout crédit dans leurs transactions avec l’Espagne démocratique.

Il y a aus­si des choses que nous trouvons étranges. Lorsqu’à Anvers la vigi­lance ouvrière empêche l’expédition de trains entiers d’armes destinées aux

rebelles, que les services de douane n’avaient pas « remarqués », le gouvernement se borne à retour­ner ces envois à leur expéditeur, en l’invitant sans doute à les réexpé­dier plus discrètement par d’autres voies ; c'est tout juste si on ne lui fait pas des excuses.  Mais lorsque quelques caisses de fusils et de cartouches sont embar­quées à Ostende et paraissent desti­nées aux gouvernementaux, la doua­ne devient soudain très perspicace ; le gouvernement fait saisir ces ar­mes et ordonne une enquête à grand spectacle pour châtier les coupa­bles.

Alors les travailleurs, les démo­crates commencent à trouver que cette neutralité ressemble étrange­ment à celle de M. Salazar. Les uns et les autres commencent à trouver que cette mauvaise plaisanterie n’a que trop duré. Et le citoyen Delattre aura beau les renvoyer à Moscou, ils sont citoyens belges et c’est au gouvernement belge qu’ils ont à de­mander des comptes. Avec la CGT française, avec le Rassemblement populaire fran­çais unanime, avec tous les antifas­cistes du monde, ils réclament la le­vée du blocus et la liberté des transactions commerciales réguliè­res avec le gouvernement de Madrid.

Ils ne permettront pas qu’Hitler et Mussolini assassinent tranquillement la démocratie en Espagne pour se retourner ensuite contre la démo­cratie française et contre nous !

 PARISET  26/09/1936


[1] Indalecio Preto (1883 – 1962) : dirigeant du Parti Socialiste Ouvrier d’Espagne (PSOE). Ministre de l »’Air et de la Marine, puis de la Défense nationale) (1936 -1938)  dans  les gouvernements de Front Populaire.

[2] Die Hards : expression désignant les ultra- conservateurs.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire