"Nous ne demandons pas que le gouvernement belge envoie au gouvernement espagnol ses escadrilles et ses pilotes comme continuent à le faire l’Italie, l’Allemagne et le Portugal. Nous demandons simplement la liberté pour l’Espagne démocratique de se procurer dans le commerce les armes, les munitions, les engins dont elle a besoin".
« Dans les premiers jours de la guerre civile, nous possédions plus d'avions que les rebelles. Aujourd'hui, après deux mois de « neutralité », ils ont une aviation supérieure à la nôtre dans la proportion de 12 à 1 ». Rien ne souligne mieux que cette déclaration du ministre de l'Air du nouveau gouvernement espagnol, le socialiste Prieto,[1] l'effroyable duperie que constitue la politique de « neutralité » dont le Gouvernement Léon Blum a pris l'initiative à l’instigation des « "Die-Hards2]" britanniques. Cette politique a été chaleureusement accueillie, au nom de la paix internationale, par tout ce que notre pays compte de réactionnaires et de fauteurs d'aventures.
Notre gouvernement d'Union Nationale qui prête trop souvent une oreille complaisante à leurs injonctions s'est empressé de s'y rallier sans réserve. Lorsque, par des faits évidents, nous montrons qu'elle revient à un blocus unilatéral du gouvernement régulier d'une nation amie on nous répond que nous prêchons l’intervention et la guerre. Non, non et non ! Nous ne demandons pas que le gouvernement belge envoie au gouvernement espagnol ses escadrilles et ses pilotes militaires comme l’ont fait et continuent à le faire l’Italie, l’Allemagne et le Portugal. En dépit de leur « adhésion » au principe de neutralité, ni Hitler, ni Mussolini n'ont rappelé les officiers italiens et allemands qui participent à la guerre dans les armées du rebelle Franco. En fait, les gouvernements de Rome et de Berlin font au gouvernement constitutionnel de Madrid une guerre non déclarée.
Nous ne demandons pas qu'on les imite, nous ne demandons pas l’intervention de la Belgique démocratique en faveur de l’Espagne démocratique. Nous demandons simplement la liberté pour celle-ci de se procurer normalement dans le commerce les armes, les munitions, les engins dont elle a besoin pour mater une minorité de factieux que hait l’immense majorité du peuple espagnol. Et nous ne pouvons que nous étonner de l’étrange « neutralité » qui consiste à suspendre la convention commerciale entre l’Espagne et la Belgique, en invitant industriels et commerçants à refuser tout crédit dans leurs transactions avec l’Espagne démocratique.
Il y a aussi des choses que nous trouvons étranges. Lorsqu’à Anvers la vigilance ouvrière empêche l’expédition de trains entiers d’armes destinées aux
rebelles, que les services de douane n’avaient pas « remarqués », le gouvernement se borne à retourner ces envois à leur expéditeur, en l’invitant sans doute à les réexpédier plus discrètement par d’autres voies ; c'est tout juste si on ne lui fait pas des excuses. Mais lorsque quelques caisses de fusils et de cartouches sont embarquées à Ostende et paraissent destinées aux gouvernementaux, la douane devient soudain très perspicace ; le gouvernement fait saisir ces armes et ordonne une enquête à grand spectacle pour châtier les coupables.
Alors les travailleurs, les démocrates commencent à trouver que cette neutralité ressemble étrangement à celle de M. Salazar. Les uns et les autres commencent à trouver que cette mauvaise plaisanterie n’a que trop duré. Et le citoyen Delattre aura beau les renvoyer à Moscou, ils sont citoyens belges et c’est au gouvernement belge qu’ils ont à demander des comptes. Avec la CGT française, avec le Rassemblement populaire français unanime, avec tous les antifascistes du monde, ils réclament la levée du blocus et la liberté des transactions commerciales régulières avec le gouvernement de Madrid.
Ils ne permettront pas qu’Hitler et Mussolini assassinent tranquillement la démocratie en Espagne pour se retourner ensuite contre la démocratie française et contre nous !
PARISET 26/09/1936
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