(...)Du
haut de la citadelle
La sentinelle tira
Par deux fois et l'un chancelle
L'autre tombe qui mourra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Ils sont en prison Lequel
A le plus triste grabat
Lequel plus que l'autre gèle
Lequel préfère les rats
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
La sentinelle tira
Par deux fois et l'un chancelle
L'autre tombe qui mourra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Ils sont en prison Lequel
A le plus triste grabat
Lequel plus que l'autre gèle
Lequel préfère les rats
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Un
rebelle est un rebelle
Deux sanglots font un seul glas
Et quand vient l'aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas( ...)
Deux sanglots font un seul glas
Et quand vient l'aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas( ...)
Louis
ARAGON La rose et le réséda
Le 25 mars prochain, je participe à
LAVOIR à la ballade familiale guidée par Annie WILDEMEERSCH, ma
compagne, par laides et par belles, de toute une vie.
Village charmant aux portes de la
HESBAYE, en bord de FOSSEROULE , affluent de la
MEHAIGNE, LAVOIR
est connu aujourd'hui pour sa quiétude bucolique, son moulin à
grain et ses fermes d' élevage .
Peu de gens savent que Lavoir , Heron,
Wanze et toute la région de HUY furent le siège d'une intense
activité de résistance à l'occupant nazi de 1940 à 1944.
Et pourtant sur la façade de la très
belle EGLISE SAINT HUBERT une stèle nous rappelle l'héroïsme d'un
martyr de la résistance,l'abbé JEAN SILVESTRE ,arrêté par les
Allemands dans sa sacristie le 19 août 1944 , et mort le 18 janvier
1945 au camp de concentration nazi de NEUENGAMME.
Jean Silvestre est né à Ferrières (Condroz) en
avril 1889.Lors de la première Guerre mondiale, il est vicaire à
Hollogne aux Pierres, puis à Soumagne et Celles. Il est désigné
comme curé de Lavoir en 1936.
AUMONIER DES MILICES
PATRIOTIQUES
Son rôle dans la Résistance est
détaillé dans le
discours prononcé à sa mémoire le 8 octobre
1945 à LAVOIR par un représentant de l' Etat Major des Milices
Patriotiques .
« Quoique
peu fortuné, il fut un des premiers de la région à soutenir
« Solidarité » ( 1) au profit des familles des déportés
et fusillés de la Résistance.
Puis
son presbytère abrita des réfractaires, des chefs de la résistance
; on y tint des réunions secrètes ; la brigade du secteur F y
complota des raids contre l'occupant ; des milliers de journaux, de
tracts y furent entreposés ainsi que d'autre matériel de la
résistance et notamment des munitions.
Il
connaissait les risques, les tortures qu'il affrontait, mais lorsque
nous lui faisions remarquer, il nous répondait avec un calme
imperturbable : " Notre Seigneur Jésus-Christ l'a fait avant
moi ".
Nous
ne pouvons énumérer tous les services qu'il a rendus pour secourir
et aider les " illégaux " ; il s'offrit même à
héberger des soldats russes (2) ; mais sa situation étant très
compromise, nous ne pûmes accepter, il les aida quand même en leur
envoyant des vivres et des dictionnaires russes.
En mai 1944, un nouveau groupement de combat naquit, les Milices Patriotiques (3) qui devaient participer à la libération nationale.
En mai 1944, un nouveau groupement de combat naquit, les Milices Patriotiques (3) qui devaient participer à la libération nationale.
Pour
récompenser l'abbé Silvestre de ses services, sur proposition du
commandant du 2e régiment, nous le nommâmes aumônier de ce
régiment.
![]() |
Le Presbytère |
Le commandant s'établit en son presbytère, celui-ci fut alors connu
comme assise de l' Etat - Major du secteur et Monsieur le
Curé transmettait fidèlement les ordres au commandant du régiment.
C'était à nouveau de son domicile que se dispersaient dans les sections environnantes, les ordres de sabotage, les milliers de directives de journaux, de tracts et le matériel clandestin. Un aviateur américain destiné à être hébergé dans le secteur passa chez lui : il ne voulut pas d'en séparer. L'aviateur y demeurât une quinzaine de jours et dut être expédié ailleurs, à la suite de l'arrestation d'un employé d'état-major séjournant au presbytère.
C'était à nouveau de son domicile que se dispersaient dans les sections environnantes, les ordres de sabotage, les milliers de directives de journaux, de tracts et le matériel clandestin. Un aviateur américain destiné à être hébergé dans le secteur passa chez lui : il ne voulut pas d'en séparer. L'aviateur y demeurât une quinzaine de jours et dut être expédié ailleurs, à la suite de l'arrestation d'un employé d'état-major séjournant au presbytère.
Il
fut stupéfié de cette arrestation et craignit dès lors pour sa
sécurité.
L'EMBUSCADE
DU 19 AOUT 1944
LAVOIR: PLACE FAYAT, "AUX TRAVAUX" ,L'EGLISE |
Après
le débarquement des troupes anglo -américaines le 6 juin 1944 en
Normandie , les opérations de résistance s'intensifient dans la
région .
C'est
ainsi que le 19 août 1944, un commando de l'Armée Secrète (4)
« prépare
une attaque contre un convoi de plus ou moins cinquante camions,
chargés de carburant et stationnés à Lavoir.
Un
groupe de Résistants prend
position aux alentours de la Place Fayat. Des hommes se postent entre
le pont et le talus de la maison d'Arthur Marique , d'autres
s'embusquent " Aux Travaux " (lieu-dit). Ils attendent des
renforts qui doivent venir de Couthuin »
Deux
soldats allemands se dirigent en se promenant vers « Les
Travaux », alors que d'autres se reposent se lavent ou se
restaurent .
EGLISE SAINT HUBERT |
Les Allemands boutent le feu à la maison de Sevrin et puis, à l'Eglise, ils arrêtent le curé Jean Sylvestre pour complicité.
Selon
un rapport de de l'AS,
« les
Allemands ont eu sept tués
dont un officier, douze blessés et perdu un chargement d'essence. »
HAUPTLAGER KZ NEUENGAMME : MATRICULE 45459
Jean
SILVESTRE est transféré dans un premier temps à la prison Saint
Léonard à Liège , puis déporté à BUCHENWALD, puis NEUENGAMME.
«
Au camp de concentration de Neuengamme, les galériens qui
travaillent avec vous prenaient votre pic ou votre pelle pour que
vous puissiez souffler un peu. Mais le mal multiple - lassitude,
faim, froid, dysenterie - vous ruina de plus en plus rapidement.
Bon
vieux curé SILVESTRE, souvenez-vous. Un jour, nous étions au
travail au Kommando SCHINLER. Vous, à cause de vos crampes d'estomac
et d'intestins, vous fûtes obligé de vous asseoir, puis de vous
laisser écrouler à terre, abrité un peu sous une énorme cuve
renversée de fer rouillé.
Il
neigeait. Une neige allemande, pesante, mêlée de pluie forte, de
gros flocons grisâtres qui évoluaient peu dans l'air et
s'empressaient de faire de la boue sous nos pieds. L'air était
humide et glacé. On est venu vous rouer de coups et vous traîner au
travail. Vous gémissiez sourdement.
![]() | ||||||||||
NEUENGAMME - L'"INFIRMERIE" où sans doute est mort JEAN SILVESTRE |
Un
autre jour, non loin de moi, vous avez remué la lourde terre
allemande au bord des bois pour creuser, avec d'autres forçats par
centaines, d'inutiles fossés anti-chars. Et je vous ai vu, entre
deux coups de pioche dans la glaise, donner des bouts de pain sec -
ces trésors - à des compagnons. Ce geste, là-bas, c'était de
l'héroïsme »
voir : ALZIN " Le calvaire et la mort de 80 prêtres belges et
luxembourgeois " :
Notes
- « SOLIDARITE » et le FRONT DE L'INDEPENDANCE (F I)
Dans
la région HUY WAREMME, comme dans la plupart des autres régions, la
plus importante des organisations civiles de Résistance est le FRONT
DE L'INDEPENDANCE.
En
août 1941 avait été fondé à LIEGE, à la taverne Piette, rue des
Guillemins, le « FRONT WALLON POUR LA LIBERATION DU PAYS »
sur l'initiative de communistes (Theo Dejace) de membres de
« WALLONIE LIBRE » et d'anglophiles .
Ils
créent le journal « LA MEUSE » (aucune paternité avec
le quotidien actuel) et appellent à Verviers, Huy, Visé, Arlon et
Charleroi au regroupement des patriotes autour du Front Wallon.
Parallèlement,
en mars 1942, est convoquée à Bruxelles une « Première
Conférence Nationale du FRONT DE L'INDEPENDANCE », front créé
initialement à l'initiative du Parti Communiste.
Le
Front Wallon représenté à cette conférence, fusionnera en
septembre 1942 avec ce qu'on nommera par ses initiales , le FI.
« SOLIDARITE »sera
, dans la mouvance du FI, l'organisation qui organisera la
solidarité , une sorte de « Croix Rouge » de la
Résistance.
Collecte pour les illégaux, , Saint Nicolas pour les
enfants des victimes des nazis, vêtements chauds pour l'hiver,
tombolas, aide de subsistance aux réfractaires etc.
A
la veille de la Libération, "SOLIDARITE" était devenue un véritable
service social avec assistantes sociales de métier et aussi un
service sanitaire pour les Milices Patriotiques.
(2) LES SOLDATS RUSSES
En
octobre 1943, une vingtaine de prisonniers soviétiques s'évadent
d'un train entre Ampsin et Seilles.
Ils
finissent par se retrouver,ne parlant pas un mot de français et
habillés en prisonniers , dans la région
de HUCCORGNE.

Certains
logent dans des grottes, ou dans des trous creusés dans le bois de
Marneffe, camouflés avec des branches, ne sortant que la nuit.
Libérés
et hébergés chez l'habitant à l'arrivée des Américains, ils
seront quand même dans un premier temps , vers le 15 septembre
,arrêtés , détenus , au même titre que les prisonniers allemands
, et parqués comme des bêtes dans une prairie par la gendarmerie ,
sur ordre du lieutenant de l'Armée Secrète Henri Collinet .
Ce
sont Marie GUISSE, Wanzoise du FI , communiste et officier de
l'Armée Belge des Partisans – (organisation armée rattachée au FI)
et
Jules LINSMEAU dit
« Mario », le commandant du secteur Nord-Ouest (Région
de Huy-Waremme), du Front de l’Indépendance (F.I.)
, qui ordonneront leur libération !
![]() |
JAMART J :"RESISTANCE HERON - WANZE" p 62 |
Les
soldats soviétiques écriront une lettre de remerciements à leurs
compagnons du maquis :
« Chers
camarades
le
groupe de camarades russes- ex prisonniers de guerre obligés de se
cacher et de vivre longtemps dans le maquis de la province de Liège,
rayon de Huy, vous adresse des remerciements
chaleureux et fraternels, à vous et vos familles, pour tout ce que
vous avez fait pour eux d'une façon aussi spontanée et dans le vrai
esprit des bolchéviks.(...) »
- LES MILICES PATRIOTIQUES
Les
MP (Milices Patriotiques) sont créées en mai – juin 1944, juste
avant le Débarquement, pour élargir la lutte armée en vue du
soulèvement national, à l'initiative du Front de l'Indépendance.
« La
lutte armée contre l'envahisseur ne doit plus être le monopole de
quelques spécialistes, elle est devenue la tâche de la Résistance
tout entière
Il
est donc grand temps de grouper, d'encadrer , d'armer les patriotes
afin qu'ils soient à même , dés à présent de résister par la
force aussi bien à la ville qu'au village aux mesures de
répression, de pillage, de déportation que l'ennemi tenterai de
mettre à exécution.
De
ce qui précède, il résulte que des Milices Patriotiques doivent
être constituées immédiatement dans chaque village, commune ou
quartier. »
(note du secrétariat national FI sur les Milices Patriotiques -
voir José GOTOVITCH – Du Rouge au Tricolore p239)
A
la Libération, les MP représenteront une « armée » de
environ 25- 30000 hommes ( et femmes) à laquelle s'ajoutent les 15000 partisans de l'Armée Belge des Partisans.
![]() | |||
Renaud PARMENTIER (FI) présente le drapeau des PA de HUCCORGNE confectionné en toile de parachute et brodé (JAMART op cité p329) |
- L'ARMEE SECRETE
Composée
à l'origine surtout de militaires de l'Armée belge, cette
organisation de résistance militaire s'était d'abord appelée
LEGION BELGE , puis ARMEE DE BELGIQUE ( reconstituée)
Le
1er juin 1944 elle prit le nom d'Armée Secrète.
L'Armée
Secrète avait la confiance absolue du gouvernement belge de Londres,
et opéra toujours sur ordre de celui-ci.
En vertu de l'instruction intitulée
"Cheval de Troie" le gouvernement de Londres lui avait
conféré un statut militaire officiel qui différenciait ainsi l'AS
des autres mouvements de Résistance. Ce qui lui vaudra aussi d'être
alimentée en armes par des parachutages anglais et d'être mieux
armée par exemple que les Partisans Armés et les Milices
Patriotiques.
Commandée par le Général Pire,
elle est répartie en 5 zones sous les ordres d'un général, elles
mêmes divisée en secteurs, commandés par un colonel , fractionnés
en « refuges » commandés par un major.
« Dés
les premiers mois d'occupation, il y eut de grandes tensions entre
les différents groupes de résistance . La Légion Belge composée
d'anciens militaires ,future AS entretenait avec le Front de
l'Indépendance où les communistes étaient très actifs des
rapports conflictuels. »(N. PARENT pp 90-92)
Rapports
conflictuels parfois idéologiques sans doute, mais aussi liés – on
peut le supposer - à l'approvisionnement en armes.
Tout au plus, selon J. GOTOVITCH, les relations entre entre FI et AS ont abouti à "un code de bonne conduite sur le terrain, mais la méfiance ne désarme pas."
En
septembre 1944, il y eut même un affrontement armé dans la
campagne de Huccorgne. où Jules Linsmeau ,commandant
du secteur Nord-Ouest (Région de Huy-Waremme), du Front de
l’Indépendance (F.I.)
, fut blessé (voir N PARENT op cité)
L'abbé
SILVESTRE et le lieutenant SEVRIN au contraire, symboliseraient ils
la rencontre dans la détresse face à l'ennemi de deux résistants
, le lieutenant mourant de l'AS et le prêtre , aumônier des MP ?
Leur
nom sont en tout cas unis dans le Martyrologue du Livre d'Or de la
Résistance.
![]() |
Stèle sur l'église SAINT HUBERT |
Sources
Sur l'abbé SILVESTRE :
Sur la résistance dans la région :

* "La Résistance dans la région de HERON - WANZE" Jean Jamart - PAC HERON 1998
* "L'entité de WANZE durant la seconde guerre mondiale" Nicolas Parent - Commune de Wanze
Aussi sur le net:
* l'Armée secrète : http://www.bibliotheca-andana.be/wp-content/uploads/2013/06/Secteur-Huy-Waremme.pdf
Aussi sur le net:
* l'Armée secrète : http://www.bibliotheca-andana.be/wp-content/uploads/2013/06/Secteur-Huy-Waremme.pdf
Sur le FI et les milices patriotiques
* José GOTOVITCH "Du Rouge au Tricolore" Editions LABOR1992