samedi 27 avril 2024

HUBERT HEDEBOUW NOUS A QUITTÉ : IMMENSE RESPECT !

 



Hubert nous a quitté. C’est tellement difficile à réaliser.

Je me disais encore, il y a quelques jours :« On se reverra peut-être, comme chaque année, à Liège le 1er Mai, ou à Manifiesta… », tellement persuadé qu’avec la force qui était la sienne, soutenu par la grande armée des camarades, il surmonterait la maladie. 

Hélas, la grande faucheuse en a décidé autrement.

Nous sommes, tous en deuil, et sa brutale disparition me cause déjà un grand vide.


Avant de connaître Hubert, j’ai connu Berten.

Quand un jour, fin 1969, je l’ai pour la première fois rencontré dans la chambre qu’il louait sous les toits, quelque part dans la banlieue de Bruxelles.

C’était un « militant du SVB », l’organisation de la gauche étudiante de Louvain, acquise au marxisme, qui s’était fait embaucher à la chaîne à Citroën Forest.

Ensemble, on a créé un journal d’usine « La Chaîne », « La Cadena » en espagnol, qu’il alimentait en nouvelles et que, nous, militants de UUU (Usines, Université, Union- gauche radicale bruxelloise) diffusions à la porte de l’usine.



 
Il y a eu plusieurs grèves dures, les patrons ont fait appel à la police, voire à la gendarmerie et ont mis sur pied une milice patronale, armée de coups de poing américains, qui patrouillait dans les rues, jusqu’autour du domicile de Berten, où nous tenions nos réunions. 
Berten, avait été l’âme de la grève ; il avait été licencié, avec 66 travailleurs et s’était, par ailleurs fait agresser à coups de matraque.                             
J’ai découvert un camarade, courageux, entier, dans son engagement personnel révolutionnaire,  pour la vie, du côté de la classe travailleuse, avec une capacité, à la fois d’écoute et d’éducation, d’être à   la fois l’élève et le professeur.

Ce sont ces expériences qui créent des liens de confiance durables et qui dépassent les chemins différents que nous avons pu prendre l’un et l’autre.

 

J’ai retrouvé Hubert 40 ans plus tard, quand j’ai, enfin, adhéré au PTB.

Assez habilement, mais sans tralala,  il m’a mis à l’épreuve en me proposant un sujet chaud : « si ça te dit, tu ne pourrais pas essayer de faire le tour du problème des "Éros center"  qui va venir au Conseil communal ? » 

Il publiait un blog « hachhach » (H.H. - Hubert Hedebouw), qu’il a fait vivre pendant 15 ans, de 2008 à décembre 2023. 

Blog assez unique dans la région liégeoise, avec ses recherches très fouillées sur le patrimoine et sur le passé industriel, ses articles sur la révolution liégeoise, les suivis de balades du dimanche matin, etc.

Soucieux d’être proche du peuple travailleur, il privilégiait l’étude locale, pour laquelle il mettait en œuvre sa rigueur intellectuelle et sa passion d’apprendre, qui en ont fait un interlocuteur incontournable pour toutes les questions d’aménagement du territoire, de sauvegarde du patrimoine, de défense de la nature urbaine.  

J’ai ainsi découvert un camarade éminemment cultivé, capable d’expliquer à la fois la peinture de Léonard Defrance, les détails de la houillère d’Oupeye ou l’histoire de la Chartreuse !



C’est lui qui m’a conseillé de créer un « blog ». Je ne savais pas ce que c’était, et j’ai commencé « ROUGEs FLAMMEs ».

Ensemble, on a lancé de 2014 à 2016, à « La Braise », un programme de conférences mensuelles du mercredi « Un autre regard sur la Grande Guerre », alternative de gauche aux commémorations officielles.

Hubert en était la cheville ouvrière : il établissait les connexions tantôt avec l’IHOES, ou tel groupe artistique, il organisait des visites d’exposition, il avait de multiples contacts, mais, homme discret, il n’aimait pas, se mettre en avant.

Et le voilà à faire le tour de Herstal avec un drapeau rouge, pour nous guider sur les traces des grévistes à l’occasion des 50 ans de la grève des ouvrières de la FN pour « à travail égal, salaire égal ». Il répétait ainsi le geste de la petite Germaine, militante communiste et figure charismatique de la grève de 1966 : « elle fait un drapeau d’un manche de brosse et d’un chiffon rouge. » Il aimait prendre ce genre d’initiatives, pas toujours programmées, mais le plus souvent bien à propos.

 


J’ai alors découvert un homme d’ouverture, capable du dialogue le plus large, du curé du coin au syndicaliste, qui avait définitivement rompu avec le sectarisme et le gauchisme du passé. Et il ne manquait pas de m’en faire la remarque, quand mon naturel de vieux gauchiste des années 70 revenait au galop. Et de m’expliquer patiemment qu’il fallait unir et non cliver.

Parce que Hubert était un homme franc qui disait ce qu’il avait à dire. Et ses jugements sur les un-e-s et les autres pouvaient parfois être implacables.

Et quand cela ne lui plaisait pas, on le voyait s’agiter sur sa chaise, tortiller impatiemment ses papiers, torturer son stylo,  en signe de désapprobation.

C’était un militant apprécié de tous, aussi parce qu’il était toujours prêt à rendre service, en ne ménageant pas son temps et sa peine. S’il n’avait pas sa langue en poche, il avait le cœur sur la main.

Cela dit, où il n’était pas trop au top, c’est dans l’usage du GPS : pas sûr que nous arriverions à bon port par le chemin le plus rapide…

 

C’est à lui, parmi les militants proches, que je m’adressais quand j’avais une question politico-personnelle difficile à résoudre. On m'avait proposé comme tête de liste régionale aux élections de 2019; nous avons longuement ensemble fait le tour de la question. Il savait bien où je mettais les pieds et ses conseils étaient francs et sensés.

C’est avec la même franchise et le même bon sens que, il y a quelques semaines, il m’a interpelé sur 30 ans de ma vie : «  Maxime, qu'as-tu eu à aller vendre des bouchons de hauts - fourneaux, alors que tu aurais pu être journaliste comme ton père ? »

Et il ajoutait, tellement confiant dans l’avenir : « A un de ces jours. Comme pour les prochains mois je ne compte pas trop m'éloigner de la Citadelle, on est en train de faire des projets pour faire du vélo dans le coin. Wanze est dans nos possibilités ! »


Nous perdons tous un camarade de grande valeur, parti bien trop tôt.

Si personne n'est irremplaçable, je dirais bien que, pour moi en tout cas, oui, Hubert est irremplaçable.

Ils ont, avec  Paula, avec tous les anciens du SVB, d’Amada et du PTB, par leur travail assidu de plusieurs décennies, par belles et par laides, créé les conditions de l’émergence d’un grand parti marxiste de la gauche radicale en Belgique, fait unique en Europe.

Le « fiston », la « petite sœur cheminote », tombés sans doute dans la marmite de la potion magique révolutionnaire quand ils étaient petits, et tous leurs camarades de la génération suivante étaient alors là, fidèles au poste, pour reprendre le flambeau.

Merci à toi, camarade Berten-Hubert.

Immense respect.

Condoléances émues à Paula, Raoul et Line, Laura, et Rafik, aux petits enfants aussi, et à toute la famille et aux proches.

Proches ? En fait ne  le sommes - nous pas tous, ses proches ?

 


mardi 26 mars 2024

COMMENT ILS NOUS ONT « COUILLONNÉ » : 40 ANS DE « MAINS DANS LE CAMBOUIS » LIBÉRAL. VOILA POURQUOI NOS PENSIONS SONT SI BASSES !



Action combinée du "Gang des Vieux en colère", des CSC Seniors et 
des Pensionnés et Prépensionnés FGTB -Gare centrale Bruxelles-
contre la suppression par la SNCB du tarif senior (février 2024)

 

Le mercredi 13 mars 2024, dans le débat des présidents de parti à la RTBF le président du PS, Paul Magnette, s’est permis de qualifier « ceux du PTB », donc ses 25000 membres, ses candidats, ses dirigeants,  de « couillons ».        Comme vieux « couillon » de 80 ans, je voudrais tracer, à partir de mon vécu, le pedigree de ceux qui, depuis plus de 40 ans nous ont, eux, très largement couillonnés.

 J’ai 80 ans et je suis pensionné depuis maintenant 16 ans ! J’ai eu le temps de découvrir quelle place nous est réservée dans cette société, et à quelle sauce on veut nous faire mourir à petit feu.                                           

On dit souvent que l’on juge la qualité d’une société à la place qu’elle accorde à ses jeunes et à ses aînés.        

La vie dans le système ultra-libéral de l’argent roi, avec des pensions légales parmi les plus basses d’Europe, est difficile pour la grande majorité des seniors. Nous avons fait face à l’explosion des factures de l’énergie suivie d’une hausse insupportable des prix du caddie. De même, la part non remboursée des soins de santé grève de plus en plus notre budget.

Ne plus pouvoir économiser, ne pas pouvoir aider ses enfants ou ses petits-enfants s’ils sont en difficulté, renoncer à tel ou tel voyage, à telle ou telle dépense, c’est le vécu d’une majorité de pensionnés, alors que les profits et les dividendes distribués par les multinationales de l’énergie, de l’agro-industrie, de la finance ou de Big Pharma n’ont, eux, jamais été aussi élevés !

 


Publicité d'AXA pour la pension complémentaire par capitalisation

Dans les années 80, la petite chanson a commencé dans les entreprises : « Vous n’aurez pas assez avec la pension légale, il faut maintenant penser à vos vieux jours »

Sont alors arrivés, les gens des assurance privées, avec leur attaché case et leur plan d’assurance- groupe. On a appelé cela le 2ème pilier, avec des pensions à 2 vitesses : il y avait des contrats plus ou moins intéressants ; des entreprises qui n’avaient tout simplement pas d’assurance groupe. Une part de la somme investie était d’ailleurs un complément d’assurance-vie et pas de pension.

Est aussi venu le 3ème pilier, l’assurance ou épargne pension individuelle. Les assurances et banques se sont rempli les poches avec ce juteux marché.

En même temps, la pension légale, basée sur la solidarité de la sécurité sociale a été détricotée ; elle n’a plus été liée au bien- être.

Personnellement, pour notre ménage plutôt privilégié de 2 pensionnés, le taux net de remplacement, rapport entre les revenus nets du travail et le montant net de nos


Action à la gare de Huy février 2024
deux pensions était autour  de 60%. (Moins encore, si on tient compte des avantages extra légaux propres à certaines entreprises, tels que les chèques - repas, l’assurance hospitalisation, l’assurance - groupe etc.)

Ce système libéral nous a conduit à la situation actuelle : de plus en plus de pensionnés et surtout des pensionnées vivent en dessous du seuil de pauvreté ; et beaucoup rencontrent des difficultés à boucler les fins de mois.

Ce qui est une honte pour un pays riche comme la Belgique.

 La grande majorité des pensionnés sont touchés :les seniors supportent de moins en moins d’être ainsi méprisés et le font savoir : Gang des vieux en colère, CSC Seniors, Prépensionnés et pensionnés FGTB, etc.

 



Nos pensions en Belgique sont parmi les plus basses d’Europe occidentale.

(1)

Taux de remplacement net 2020 (Données OCDE 2020)
En Belgique, un retraité touche en moyenne, en net, 61.9% de son dernier salaire net

Pourquoi ?

Comment est-ce possible, alors que, le département des Pensions a été dirigé, par un ministre socialiste (PSB, puis PS ou SP - spa) pendant 31 années sur 43 ?

Sans interruption, par exemple, de mai 1988 à décembre 2012 !

Les noms de Alain Van der Biest, Léona Detiège, Marcel Colla, Gilbert Mottard, Frank Vandenbroucke, Bruno Tobback, Marie Arena sont dans notre mémoire, avant que les libéraux ne s’emparent du département en 2012, imposent l’âge légal à 67 ans, détricotent le système de pension anticipée et de prépension et tentent, en vain, avec le triste sieur Bacquelaine de donner le coup de grâce au système de solidarité, déjà bien affaibli.



Ministres des Pensions 1977-2024
 
 PS- spa

Parmi les principales raisons, il y a le calcul de la pension sur l'ensemble de la carrière, la fixation  de la "carrière complète" à 45 ans, le taux de 60% (pour les "isolés"), doublé d'un plafond salarial dans le calcul du revenu de pension.
Mais il y a une cause largement occultée : le montant de la pension, qui est une partie différée du salaire, n’a pas été lié à l’évolution réelle, hors index, des salaires bruts.

On appelle cela la liaison au bien-être.

Pourtant en 1972-1973, des ministres socialistes de la Prévoyance sociale, Louis Namèche et Frank Van Acker, avaient fait voter une loi qui ajustait le montant des pensions au bien- être. Chaque année, le Parlement aurait dû définir un coefficient d’ajustement : après une augmentation de 8% en 1973, il avait été établi pour 1974 à 4%. (2)



projet de loi Namèche - Van Acker (votée le 28 mars 1973)

Mais la loi Namèche-Van Acker (3) n’a été appliquée que pendant 3 ans, 
les arrêtés d’exécution n’ayant plus jamais été votés !
Depuis 2007, une « enveloppe bien être » destinée notamment à augmenter les pensions est discutée entre partenaires sociaux et gouvernement tous les 2 ans, mais cela représentait des cacahuètes pour la grande majorité des pensionnés ; dans mon cas, moins de 10€ net par mois tous les 2 ans. 
C’est ressenti comme une aumône aux plus pauvres, non comme l’application du droit pour tous les seniors de vivre dans la dignité.

Actuellement, cette enveloppe concerne un lent ajustement de la pension minimum et, pour le pensionné moyen, un one shot de 2%, 5 ans après le début de la pension.


L’étude du CEPAG estimait, ainsi, le recul du montant des pensions par rapport au niveau des salaires bruts de 1977 à 2018 à un minimum de 82% !

On ne peut comprendre cette dégradation sur le long terme de nos pensions légales de retraite qu’en analysant le rôle déterminant de la Commission Européenne dans leur lente mise à mort.

Celle-ci, vampirisée par les lobbys des multinationales, notamment des banques et des assurances, est à la chasse des « dépenses publiques », responsables, selon elle, des « déficits publics ».

Et les dépenses liées au « vieillissement » sont depuis des décennies dans son collimateur.

Le but, clairement avoué, est de minimiser  la pension légale pour favoriser le développement des  2ème et 3ème piliers  basés sur la capitalisation, assurance collective d’entreprise (appelée souvent assurance groupe) ou assurance individuelle.

S’ouvrait ainsi au secteur financier privé des banques et des assurances, le juteux marché de la « pension complémentaire ».

J’ai connu, dans les années 80, la pression à l’embauche pour rendre  "fortement souhaitable" la participation aux assurances groupe.

40 ans plus tard, 24 entreprises d'assurances et 179 fonds de pension géraient, au 1er janvier 2018, en Belgique, quelques 80,3 milliards € de réserves acquises par 3,7 millions de personnes !

Une résolution du Parlement Européen, sur proposition de la Commission avait été à ce sujet particulièrement claire : "le financement des pensions ne peut être entièrement laissé au secteur public, mais doit reposer sur des systèmes à trois piliers, comprenant des régimes de retraite publics, professionnels et privés, dûment garantis par une réglementation et une surveillance spécifiques destinées à protéger les investisseurs". (Résolution du Parlement européen du 20 octobre 2010 ).

En 2013, le même Parlement européen invitait les Etats membres « à constituer des pensions professionnelles complémentaires par capitalisation" ».


Le salaire différé de la sécurité sociale devient un « investissement » !

Et inévitablement l’écart des revenus se creuse : ce sont les revenus les plus hauts, avec les emplois les plus stables, et les carrières les plus complètes, qui bénéficient le plus de ce système libéral ; les revenus les plus bas, les statuts les plus précaires, les carrières les plus courtes (majoritairement les femmes) sont quasi exclues de la pension complémentaire. 

Ce sont les pensions à 2 vitesses : les travailleurs pauvres deviendront  des pensionnés encore plus pauvres. 

La Commission Européenne ne s’est pas seulement attaquée au montant de la pension légale ; elle a aussi, et recommandé le recul de l’âge de la retraite, et condamner tout système de pension anticipée ou de prépension (RCC).

Et c’est cette orientation qui a été suivie depuis 40 ans par les gouvernements successifs et leur ministre des Pensions (le plus souvent, on l’a vu, socialiste).

C’est Marcel Colla qui, se conformant aux directives européennes, a cosigné l’arrêté royal de décembre 1996 sur l’allongement de la durée du travail des femmes de 60 à 65 ans, au nom de l'égalité de traitement entre hommes et femmes (!). « Égalité » par le nivellement par le bas.


 C’est Frank Vandenbroucke qui a systématisé et   règlementé le système par capitalisation dans la loi sur   les  pensions complémentaires (LPC) de mai 2003. C’est   aussi feu Michel Daerden, qui, dans le « livre vert » de   2010, a appelé les seniors à rester 3 ans de plus au travail   tout en rêvant « d’arriver au seuil du bien-être (1500€)   en   généralisant une pension complémentaire".
 Quant à la ministre Lallieux, elle est parvenue à faire des   économies supplémentaires sur les pensions des   fonctionnaires, tout en mangeant la promesse socialiste   de   rétablir l'âge légal à 65 ans, ne fut ce que pour les   métiers pénibles.

 Mais je n’en ai vu aucun, à ma connaissance du   moins, proposer l’application, avec effets   rétroactifs de la loi Namèche – Van Acker.


On le voit, les 13 ministres socialistes en charge des Pensions ont, sans état d'âme, enfourché le cheval néo libéral ; c'est sans doute le premier secteur public soumis à la privatisation, partielle sans doute, mais aux effets désastreux.

Pour contrecarrer ces politiques libérales, la première chose, c’est de redonner tout de suite sa place déterminante à la pension légale pour tous, en commençant à « rattraper » ce qui nous est dû et en redonnant aux seniors la dignité qu’ils méritent !

C’est dans ce sens que va le programme du PTB pour ces élections du 9 juin  (4) :  

 


·    Les personnes qui ont travaillé toute leur vie ont droit à un revenu décent. Nous augmentons la pension minimale à 1 850 euros net par personne.

·    La pension légale des salariés et des indépendants est portée progressivement à 75 % du salaire moyen ou du revenu professionnel.

·       Nous ramenons l’âge légal de la pension complète à 65 ans.

·       Nous réinstaurons la possibilité de la pension anticipée à partir de 60 ans après 40 années de travail.

·       Les personnes qui ont exercé pendant 35 ans un métier pénible doivent pouvoir prendre leur pension plus tôt.

·       Les plus de 55 ans doivent à nouveau pouvoir bénéficier d'aménagements de fin de carrière assortis d'indemnités afin que le travail reste faisable pour les travailleurs plus âgés.





(1)  PTB : L'écart de pension par rapport à nos pays voisins - Service d'études du PTB | Kim De Witte 2019.

(2)  CEPAG : La liaison à l'évolution des salaires -2018.

(3)  Chambre des représentants : Projet  de loi majorant les pensions des travailleurs salariés 22-11-1972

(4)Programme PTB 2024   https://www.ptb.be/programme/pension


dimanche 18 février 2024

MERCI JOSÉ


 

José Gotovitch, lors du Festival Films et Fascisme- Saint Gilles 2005 
 Photo Résistances Manuel Abramowicz


Samedi 17 février 2024.

Incrédule, je découvre ce matin, la bien triste nouvelle : José Gotovitch nous a quitté … Si vite !

Nous l’avions rencontré, pour la dernière fois, en  mai dernier chez mon frère Michel, qui avait, avec notre regrettée belle-sœur, organisé une rencontre entre amis pour échanger sur son dernier livre consacré à l‘histoire des Jeunesses et Étudiants communistes.



Il y mettait notamment en évidence le rôle de notre père Arthur Tondeur dans la création du premier groupe d’étudiants marxistes à l’ULB en 1930.

De notre côté, nous avions, mon frère François et moi, mobilisé notre passion pour l’histoire, lui en retraçant la vie de nos parents et de leur engagement politique, moi-même en rassemblant les principaux articles de politique étrangère de notre père dans « La Voix du Peuple » d’avant-guerre.

Quel bel après-midi passé ensemble, dans la bonne humeur, l’écoute de chacun, sans oublier le délice des pâtisseries – maison !

Grand moment aussi quand, à quelques-uns ils entonnent la chanson des « Petits-fils des Vétérans du Roi Albert », sorte de confrérie folklorico-guindailleuse qu’ils avaient maintenu en vie pendant plus de 60 ans.


Pour Anne, mon épouse, et moi, José était une vieille connaissance.

Je l’avais rencontré pour la première fois en janvier 1961, lors des grandes manifestations contre la loi unique, auxquelles participaient un solide groupe étudiant, et aux piquets de grève que nous installions sur le campus.


Janvier 1961- Bruxelles: les étudiants sur les marches de la Bourse.

Souvenir particulier aussi d’un soir de février 1961, alors que nous venions d’apprendre l’assassinat de Patrice Lumumba : nous nous sommes retrouvés dans une 2CV, Jean- Pierre Olivier, Michel Graindorge, José et moi pour patrouiller autour de l’ambassade du Congo, rue Marie de Bourgogne. Sans doute, ce repérage devait-il préparer un futur chaulage percutant ?

 

Par la suite, j’avais près de 18 ans et j’ai rejoint l’UNEC (Union Nationale des Étudiants Communistes) dont José était secrétaire national.

Il était aussi directeur de la revue de bonne facture des Étudiants Communistes, « En Avant ».


Ces années 61-62 à l’UNEC ont été riches en rencontres, en débats, en actions.

J'y revois José, à la conférence nationale de l’UNEC, en février 1962, à un week end de formation sur le  « XXIIème Congrès du Parti Communiste d’Union Soviétique » avec Ernest Burnelle, à un stage de vacances des EC à l’été 1962 à Rochehaut, dans la vallée de la Semois, à la nuit de Nouvel An 62 à Athis et  à une folle nuit au « Petit Lénine » petit café de la rue des Chapeliers, le 14 avril 1961 pour fêter le vol de Gagarine dans l’espace.



Les meetings, les manifs aussi : Cuba, l'Algérie...
.
Sans doute faisait-il aussi partie du groupe des EC participant à la Semaine de la Pensée Marxiste à Paris….



Par la suite, nos chemins se sont séparés : nous nous sommes engagés, Anne Wildemeersch et moi, dans le courant dit « prochinois » animé par Jacques Grippa, alors que José, fidèle au Parti Communiste « officiel », entamait un brillant parcours universitaire d’historien du communisme, en particulier pendant la IIe guerre mondiale.

Je le rencontrerai alors par livre interposé, en découvrant avec grande curiosité « L’an 40 » ou « Du Rouge au tricolore », pour lequel il avait par ailleurs   interviewé mon père.

 

J’ai retrouvé José 50 ans plus tard. Nous organisions à Liège, à La Braise, avec Hubert Hedebouw, un cycle de conférences et de débats sur la « Grande Guerre » (« Un autre regard sur la guerre 14-18 »)

 José y avait naturellement sa place   comme conférencier, et il a accepté   bien volontiers de nous parler du   Conseil révolutionnaire de soldats   dans  l’armée allemande d’occupation   en novembre 1918 à Bruxelles.

 Comme toujours, exposé clair,   passionnant, rigoureux, pas du tout   académique : il savait faire aimer   l’histoire à son public.



La Braise - Liège- 15 avril 2015 : 

Depuis, nous sommes restés en contacts réguliers ; et au fil de mes lectures, j’ai découvert de multiples ouvrages et articles de José : ici, sur la Guerre d’Espagne, là  les biographies du Maîtron ou du CArcob, là encore un docu sur la grève des mineurs liégeois en mai 1941.

Je (re)découvrirai ainsi un  José, pourtant professeur honoraire de réputation mondiale, à l’autorité scientifique reconnue, non seulement  homme jovial et passionné, ouvert, toujours à l’écoute, respectueux de chacun, mais aussi comme un camarade, historien militant, prêt à donner de lui-même quand cela pouvait faire avancer à la base l’incontournable connaissance de l’histoire.

Alors qu'il avait décidé mordicus d'arrêter les conférences, il me confiait après une rencontre dont il n'était pas au courant : « Tu sais que je suis toujours dispo pour ce genre de choses ». 

Fait remarquable: il ne s'est pas laisser enfermer dans les soubresauts idéologiques mortifères du déclin du parti communiste. Au contraire, il a fait du CArcob, (centre des Archives communistes), un centre d'archives reconnu et s'est imposé comme historien, par belles et par laides,  de tout son passé... y compris de ses moments glorieux.



Son œuvre est considérable.
 Elle est aussi fondamentale.

A l’heure du révisionnisme historique tous azimuts, quand jusque sur les bancs du Parlement européen, le communisme est assimilé au nazisme, l’œuvre de José Gotovitch, comme un roc scientifique et inattaquable, rétablit la vérité historique : la Résistance à l’axe Berlin-Rome-Tokyo, faite de multiples obédiences politiques dans lesquelles les combattants animés par "l’idéologie communiste » et l’amour de leur patrie, a  joué un rôle important, voire décisif et fait partie, à tout jamais, de la mémoire des peuples d’Europe et du monde.

Gotovitch était signataire de ce manifeste (2/10/2019) d'intellectuels et professeurs 
belges, paru dans « La Libre » en réponse à la résolution du Parlement Européen (19/09/2019)





Son oeuvre nous interpelle aussi sur l’importance de la connaissance historique : on ne peut pas comprendre le monde d’aujourd’hui, pour pouvoir  le transformer, sans bien connaître et en analyser le passé.

C’est pourquoi, bien plus qu’une œuvre académique, c’est un outil de combat qu’il nous laisse.

Aux jeunes camarades de le faire vivre, de s’en servir comme éclairage pour les combats futurs.

Et à nous tous de lui dire :

« MERCI JOSE »